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Compte-rendu - Festival de la Chaise-Dieu - Arsys mène Israël en Terre promise
La crise n’épargne pas les festivals qui y répondent de plus en plus par la politique des partenariats ; ce qui réduit heureusement la part de chacun dans le coût global de la co-production, outre le regard différent que le nouveau lieu d’accueil permet souvent de poser sur les oeuvres. Ainsi saisi, après Vézelay, par la mania haendélienne, la Chaise-Dieu vient de présenter Israël en Egypte avec les mêmes acteurs qu’en Bourgogne : Pierre Cao (photo) et son chœur Arsys.
Mais ici, quelques précisions biographiques semblent s’imposer. Et d’abord, la genèse d’Israël en Egypte est l’histoire d’une résurrection : celle qui rendit à la musique le Caro Sassone lui-même. A cette époque (vers 1735), Haendel qui vient d’avoir cinquante ans, connaît des moments difficiles : ennuis d’argent, notamment, auxquels s’ajoutent la concurrence (celle de Porpora et de Hasse sur le terrain de l’opéra italien) et les cabales. Courageusement, il fait face, mais de graves problèmes de santé surgissent alors, dont une attaque avec paralysie, suivie d’un état dépressif qui va l’éloigner de toute activité musicale (dont la composition).
C’est alors que le miracle survient avec une cure aux eaux d’Aix-La-Chapelle d’où il rentre revigoré et ayant retrouvé l’inspiration. Deux chefs-d’œuvre, écrits d’un seul trait, sont le fruit de cette guérison inespérée : Saül et surtout Israël en Egypte, composé en 4 semaines, du 1er au 28 octobre 1738 ! Une épopée collective que certains ont baptisé « l’oratorio des oratorios » (le Messie étant hors concours, bien sûr) et qui conte en quelque 28 choeurs l’histoire d’un peuple, et non d’un homme.
Une tradition non vérifiée prétend que c’est le musicien lui-même qui en rédigea le livret, compilant en l’occurrence le texte de l’Exode et les psaumes 78, 105 et 106. En tout cas, partagée en 2 volets : l’Exode et le Cantique de Moïse, la partition est un bonheur permanent pour Arsys et son directeur charismatique qui, avec la complicité de l’inattendu, mais méritant Orchestre Baroque de Séville, chassent une fois encore sur leurs terres d’élection, portés par une ferveur première qui rend vaine toute querelle d’interprétation entre les approches jugées traditionnelles et une lecture supposée « d’époque ».
Plus précisément, c’est la spécificité du chef luxembourgeois que d’investir la musique du dedans, tout en mariant dans un même élan la fièvre dynamique et la dévotion intérieure. De ce point de vue, il existe aujourd’hui un style Arsys qui joint la volonté d’un son toujours signifiant (la saisissante imagerie des plaies d’Egypte frappant Pharaon et son peuple) au don du mot, devenu souci rhétorique incontournable. Et Pierre Cao s’y confirme fresquiste habité, coloré, sans pour autant sacrifier la qualité du chant soliste à la spatialité du choeur ; le petit nombre des arias qui émaillent l’oratorio étant défendu par un plateau inattaquable où brille la basse épanouie de Peter Harvey : un familier du public français depuis un certain Requiem de Fauré vieux maintenant de près de vingt ans.
Roger Tellart
Festival de la Chaise-Dieu, 24 août 2009
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Photo : DR
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