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Compte-rendu : Le Barbier de Séville au Angers Nantes Opéra - Dans l’ombre de Mozart
Avouera-t-on qu’on redoute toujours Le Barbier de Séville ? Chef-d’œuvre disent certains, mais alors chef-d’œuvre fragile dont des chanteurs trop zélés et des chefs en mal de présence forcent trop souvent les traits jusqu’à la caricature.
C’est de cet écueil que la direction alerte, mais tendre aussi, déployée par Giuseppe Grazioli sauve la partition. Mine de rien le génie de Rossini brille tout à coup dans l’ombre de celui de Mozart, les finales des deux actes filant leurs ariosos et leurs ensembles d’un seul grand mouvement continu au point de rappeler ceux des Nozze di Figaro. Le geste scénique de Frédéric Bélier-Garcia qui avait déjà présenté à Graslin un désopilant Conte Ory, fait également la comédie légère, ne soulignant ni les effets du comique de situation, ni les charges des caractères : tout juste Basilio éclate-t-il les cadres avec son rire de tête et son basso profundo. Le grand physique, en taille et en carrure, de Wenwei Zhang autorise naturellement un jeu truculent.
Par contraste tous les autres se font idéalement légers, même le Bartolo de Franck Leguérinel, finement joué jusque dans ses appuis, et chanté avec un aplomb crâne. Les autres ont tous l’âge de leur rôle, c’est un avantage incontestable, même si l’on peut trouver le Figaro de Kevin Greenlaw un peur débraillé vocalement, ou l’admirable Philippe Talbot encore un peu vert pour son premier Almaviva. Mais quelle grâce, quels allègements, quel art de la couleur il met à son chant !
Une Janet Fischer évidemment irrésistible en Berta, avec un double domestique masculin très finement incarné dans la grande tradition burlesque (David Migeot), un très bon Fiorello issu des chœurs (Eric Vrain, au même diapason de forme et de présence que ses collègues), tous laissaient la place devant la première Rosine de Paola Gardina. Délicieuse, vocalisant sans dureté, mieux ! y mettant du legato, elle est la plus juste des Rosine qu’on ait vue, jusque dans sa volonté de garder toujours au personnage une fraîcheur, une sensualité sans ombre. On succombe devant le timbre ambré, on rend les armes face à cette présence scénique radieuse, qui osera probablement plus demain. En la voyant déambuler dans le beau costume XVIIIe que lui avaient confectionné Catherine et Sarah Leterrier, on songeait que bientôt elle serait une très attachante Comtesse des Nozze.
Jean-Charles Hoffelé
Rossini : Le Barbier de Séville - Nantes, Théâtre Le Grand T, le 1er, puis le 5 octobre. Ensuite le spectacle se voit à Angers, au Théâtre Le Quai, les 13, 15 et 17 octobre 2010
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