Après un Kaiser von Atlantis de Viktor Ullmann très réussi en 2004, une nouvelle collaboration de l’Opéra national de Lorraine et Théâtre de la Manufacture s’est mise en place pour le Tribun de Mauricio Kagel.

Créé à la Westdeutscher Rundfunk de Cologne en 1979, ce texte radiophonique pour « un orateur politique, éclats de fanfare et haut-parleurs » (dixit Kagel), trouve en la personne de Charles Tordjman, directeur du Théâtre de la Manufacture, un metteur en scène inspiré.

La scénographie proposée rappelle le monde l’enfance avec des objets simples et redimensionnés (cinq immenses cases qui plus tard suggèreront des chars d’assaut) dans lesquels sont installés les musiciens. Ils finiront par enfermer le tribun dans un univers clôt d’où il ne pourra plus s’échapper.

Magnifique prouesse que celle de Dominique Pinon (photo), qui, une heure durant, habite le plateau par son jeu halluciné. Texte désarticulé, gesticulation forcée : on le voit peu à peu sombrer dans la folie.

L’écriture de Kagel n’est pas sans rappeler la musique de cabaret des années trente, de même que de nombreuses marches caricaturent des musiques chères aux dictatures. Olivier Dejours dirige avec brio l’ensemble issu de l’Orchestre Symphonique et Lyrique de Nancy. Pantins soumis au bon vouloir du pouvoir et vêtus d’ubuesque façon, les instrumentistes font partie intégrante d’un spectacle d’une grande force.

Bernard Niedda

Maurizio Kagel : Le Tribun - Nancy, Théâtre de la Manufacture, le 2 mai 2009

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Photo : DR