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Compte-rendu : Matthias Goerne et Daniele Gatti - Justesse de l’émotion
Nouvelle pierre à l’édifice mahlérien de Daniele Gatti et de l’Orchestre National, le Châtelet retrouvait le maestro italien et Matthias Goerne pour une soirée regroupant les Kindertotenlieder et la 5ème Symphonie. Pour interpréter le douloureux recueil composé sur des poèmes de Rückert, Matthias Goerne - déjà présent en décembre dernier pour le Knaben Wunderhorn – est le musicien idéal. Baryton au timbre prenant, colosse aux raffinements stylisés, sa manière subtile d'effleurer les mots et de caresser les notes pour mieux se fondre dans le tapis orchestral, est tout simplement magnifique.
Taillée pour ce répertoire, sa voix traduit avec une grande finesse la complexité des émotions contenues dans chaque poème et se fait tout à tour lumineuse "Nun will die Sonn'", délicate, tendre, affectueuse "Wenn dein Mütterlein" ou appeurée "In diesem Wetter", mais toujours contrôlée et mise en valeur par un orchestre aux sonorités profondes.
Sûr de son geste et du trajet à accomplir pour mener ses troupes de la Marche funèbre jusqu'au triomphal final de la Symphonie en ut dièse mineur, Daniele Gatti maîtrise parfaitement son sujet. Mordante, rutilante, emportée ou d'une belle intériorité, sa phalange puissante, équilibrée, d'une précision infaillible, même dans les tutti les plus impressionnants où la tempête semblait faire rage sans qu'aucun soliste ne lâche prise, a comblé le public, apaisé et frémissant d'aise pendant le célèbre Adagietto, conduit avec art. Prochain volet du cycle Mahler du National le 13 janvier, avec les Rückert-Lieder et la 6ème Symphonie.
François Lesueur
Paris, Théâtre du Châtelet, 23 septembre 2010
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