Journal
Don Carlo au Teatro Comunale di Modena (Streaming) – La tête au Caré – Compte-rendu
Sur le papier la distribution réunie autour de la soprano Anna Pirozzi, pour ses débuts dans le rôle d’Elisabetta, s’annonce pleine de promesses. Pertusi, Salsi et Caré ne sont pas des inconnus mais leurs prestations auraient sans doute gagné en assurance et en qualité si elles avaient bénéficié d’un chef plus compétent. Dépassé par l’ampleur de la partition qui ne laisse pas un moment de répit, Jordi Bernacer accomplit sa tâche avec honnêteté, sans pour autant entourer les chanteurs de toutes les attentions nécessaires. L’Orchestra dell'Emilia-Romagna Arturo Toscanini sonne plat, les approximations sont fréquentes et les décalages entre solistes, chœur et instrumentistes ne font que renforcer le manque de cohésion d’ensemble. Des défauts en partie compensés par les artistes choisis pour relever ce défi.
Les premiers pas d’Anna Pirozzi sont plutôt réussis ; cette voix dramatique aux aigus percutants et capable d’agilité, appréciée dans Nabucco, Macbeth, Trovatore, Forza del destino, I due Foscari et Aida, a su préserver une ligne de chant soignée, un appréciable legato et de réelles nuances dans la conduite forte/piano. Si les réserves de souffle sont loin d’égaler celle de la Caballé de la grande époque, Pirozzi semble suivre ce modèle et polit ses fins de phrases avec attention surtout dans « Non pianger mia compagna », son autoritaire « Tu che le vanità » comme le duo final avec Don Carlo, manquant encore de couleurs pour accompagner les affects dont la musique est gorgée.
A 39 ans et une carrière menée avec discernement, Andrea Caré (photo) devrait faire des étincelles dans le rôle-titre, mais par excès de prudence ou d’inquiétude face aux difficultés de l’entreprise, sa voix montre vite des signes de fatigue surtout dans le registre aigu, étranglé ou escamoté, la tessiture et la longueur de sa partie le montrant, malgré de réels efforts d’implication, à la peine (l’expression de son visage fermé et sa manière de serrer les poings trahissent pendant toute la durée de la captation son mal-être). Cette prestation aura certainement pour le ténor valeur de test pour savoir s’il reprendra ou pas ce personnage à l’avenir. Luca Salsi retrouve ses marques avec un Marquis de Posa sereinement abordé, à la différence de son récent Ernesto du Pirata à Naples(1), Michele Pertusi toujours un peu froid et guindé, parvenant une fois encore à faire illusion dans l’un des plus beaux rôles de basses composés par Verdi qui dépasse ses moyens actuels, surtout lorsqu’il se voit confronté à la voix sépulcrale et caverneuse de Ramaz Chikviladze en Grand inquisiteur. En Eboli, Judit Kutasi fait craindre le pire dans son air d’entrée avant de se rétablir dans le trio « Trema per te » et d’imposer sa voix large et puissante dans un « Don fatale » engagé. A noter enfin les belles interventions d’Andrea Galli et de Michela Antenucci.
François Lesueur
Giuseppe Verdi : Don Carlo – 6 février 2021, disponible sur www.youtube.com/channel/UCh3dBhZicUoSIAspcwuHOKQ
Prochains rendez-vous sur OperaStreaming :
26 Mars 2021: Rossini Il barbiere di Siviglia | Teatro Municipale, Reggio Emilia
16 Avril 2021: Verdi Aroldo | Teatro "Amintore Galli", Rimini
18 Avril 2021: Donizetti La Favorite | Teatro Municipale, Piacenza
14 Mai 2021: Vivaldi Il Farnace | Teatro Comunale, Ferrara
Photo © OperaStreaming
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