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Emmanuel Krivine et la Chambre Philharmonique - La musique n’est pas un long fleuve tranquille - Compte-rendu
Avec son front têtu, Emmanuel Krivine est un pédagogue redoutable. Ainsi s’est-il coulé dans le moule imposé par la Cité de la Musique qui célébrait à la fois les principaux fleuves du monde et le bicentenaire de Wagner en proposant un « Voyage sur le Rhin » à bord de la Chambre Philharmonique équipée d’instruments contemporains des œuvres au programme. Wagner passant pour un fils de Schumann, Krivine se mit en tête d’illustrer, que dis-je, de démontrer cette filiation musicale. Mais pour lui, un fleuve ne se descend pas : on remonte à sa source !
La soirée s’ouvrit donc par l’aboutissement du processus avec le fameux Voyage de Siegfried sur le Rhin tiré du Crépuscule des dieux au terme de la Tétralogie. Le fleuve ondule par-dessus ses mystères enfouis. La page répond, à douze heures d’intervalle, au Prélude de L’Or du Rhin dont le grave des contrebasses va engendrer tout le drame. La lecture décapante de Krivine, sans vibrato aux cordes, n’enlève rien au dramatisme de l’orchestre qui sort ragaillardi de la fosse.
Le vol de l’or qui suit la dispute homérique entre les trois filles du Rhin et le nain Alberich (Alexandra Lubschansky, Cécile Perrin, Nora Gubisch et Olivier Zwang) s’opère avec infiniment de doigté. Mais la remontée à la source proprement dite ne viendra qu’après l’entracte avec la 3ème Symphonie dite « Rhénane » de Robert Schumann. L’orchestre perd soudain de sa magie par excès de raideur. La volonté démonstrative du chef tient trop les instrumentistes en lisière privant l’œuvre de sa spontanéité première et de sa légèreté native.
Jacques Doucelin
Paris, Cité de la musique, 12 octobre 2013
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Photo : DR
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