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Guillaume Tell au Metropolitan Opera – Retour en demi-teinte – Compte-rendu
Il était temps, après quatre-vingt-cinq ans d’absence, de permettre au public new-yorkais d’écouter Guillaume Tell, qui plus est dans sa version originale en français. L’ouvrage, novateur pour l’époque et mal accueilli à sa création en 1830, n’est pas des plus faciles à mettre en scène ; rares sont les théâtres qui ont été en mesure de proposer des productions inoubliables. Celle de Pierre Audi ne fait pas exception : si les moyens sont là, visibles dans de lourds décors à la fois futuristes et naïfs (pourquoi ces roches en carton-pâte ?) de George Tsypin, des costumes tapageurs d’Andrea Schmidt-Futterer et des lumières high tech de Jean Kalman, il manque un point de vue, une âme qui donnerait du sens : une impression de flottement artistique sans réelle unité nimbe l’ensemble
Dépassé par les enjeux d’une ambitieuse partition, Audi délaisse la direction d’acteur, échoue à régler convenablement les grandes scènes de foule pensant satisfaire les spectateurs avec quelques chorégraphies ridicules (pourquoi conserver cet impossible ballet ?) et quelques images aux effets vite oubliés. A tout prendre, la production pleine d’esprit de Francesca Zambello proposée à la Bastille en 2003 est préférable.
Dans la fosse, Fabio Luisi - applaudi des deux mains pour sa direction de Don Giovanni quelques jours plus tôt (1) -, qui peut compter sur un orchestre aux compétences illimités, fait de son mieux pour traduire l’atmosphère éminemment romantique de cet ouvrage d’un genre nouveau, sans pour autant en éviter les longueurs.
Intransigeant dans les grands tutti avec chacun des effectifs (solistes, choristes et instrumentistes), il sait trouver le ton juste pour laisser la mélodie dérouler ses charmes tout en inspirant certaines individualités.
Et en premier lieu celle de Gerald Finley (photo) dans le rôle-titre, qui saisit avec humanité élégance et robustesse toutes les facettes du héros en lutte. Timbre, diction, unité des registres, intelligence du texte, tout concourt à faire de son interprétation une pièce maîtresse de cette résurrection. Malgré la difficulté du rôle d'Arnold, Bryan Hymel peut compter en toutes circonstances sur le soutien indéfectible du chef. Le ténor vient à bout de cette tessiture harassante dont il tient à respecter l'écriture, malheureusement compromise par son timbre ingrat et nasal, ainsi qu'un style qui mériterait d'être plus surveillé, notamment la conclusion du grand aria « Asile héréditaire ».
Bryan Hymel (Arnold) et Marina Rebeka (Mathilde) © Jonathan Tichler / Metropolitan Opera
Marina Rebeka, qui avait fait grande impression à Pesaro en 2013 auprès de Juan-Diego Flórez (DVD Decca), est en revanche une Mathilde bien décevante : la voix métallique et coupante, les vocalises hachées, le phrasé exempt de la moindre coloration et le français calamiteux deviennent vite lassants et rédhibitoires dans pareil répertoire, et ce bien avant que le rideau ne tombe.
En Gesler John Relyea ne fait que du son, forçant sur ses moyens sans doute pour les accorder à l’odieux personnage qu’il interprète, Michele Angelini (Ruodi), Michael Todd Simpson (Leuthold) et Kwangchul Youn (Melchtal) chantant avec conviction leurs rôles, tout comme Maria Zifchak et Janai Brugger, respectivement Hedwige et Jemmy.
François Lesueur
(1) www.concertclassic.com/article/don-giovanni-au-metropolitan-opera-le-retour-en-force-de-simon-keenlyside-compte-rendu-0
Rossini : Guillaume Tell – New York, Metropolitan Opera, 25 octobre 2016 / www.metopera.org/Season/2016-17-Season/guillaume-tell-rossini-tickets/
Photo © Jonathan Tichler / Metropolitan Opera
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