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Il Giasone de Cavalli à l’Opéra royal de Versailles - En majesté - Compte-rendu
Reprise de la production donnée à Genève début 2017 (1), Il Giasone investit l’Opéra royal de Versailles, réceptacle on ne peut plus approprié esthétiquement et historiquement (quand on se souvient aussi que c’est à un opéra de Cavalli qu’est revenu de fêter en 1660 le mariage de Louis XIV). L’initiative incombe à Leonardo García Alarcón, dont on sait qu’il s’est fait une spécialité et un devoir de la résurrection des opéras de Cavalli, comme Elena à Aix en 2013, Eliogabalo à l’Opéra de Paris en 2016 ou récemment Erismena (2).
Dans le cas de Il Giasone, la mise en scène est à la charge de Serena Sinigaglia, dans une conception fastueuse associant évocations historicistes et touches actuelles, un jeu scénique affriolant, des décors et costumes magnifiques d’Ezio Toffolutti sous des lumières ouvragées (signées Simon Trottet). Un faste qui correspond à l’esprit de grand spectacle de l’œuvre (pour l’époque en 1649), comme à la trame, inspirée de la mythologie grecque, qui narre les amours doubles et tumultueuses de Jason (Giasone) pour Médée (Medea) et Hypsipyle (Isifile). Adultères, batailles, magies, juxtaposant rebondissements, situations comiques et poignantes.
Valer Sabadus ( Giasone) & Kristina Hammarström (Medea)
Le plateau vocal, pléthorique, s’insère on ne peut mieux, dans des caractérisations ardemment plantées et des voix circonstanciées. Valer Sabadus exprime le rôle-titre dans la constance souveraine d’un contreténor toujours élégiaque. La mezzo Kristina Hammarström et la soprano Francesca Aspromonte lui donnent fière réplique, Medea et Isifile de grande facture. Alors que le moindre rôle bénéficie de vocalités immanentes, par les chants assurés de Taras Berezhansky, Günes Gürle, Raúl Giménez, Alejandro Meerapfel, Dominique Visse (irrésistible travesti) ou Mariana Flores. Et García Alarcón distille dans sa direction la ferveur qu’on lui connaît, face aux instrumentistes chevronnés de sa Cappella Mediterranea. En toute majesté et avec une intensité sans relâche, dans cette version établie à partir de différentes sources par notre chef d’orchestre, durant le défi des trois heures d’une musique qui sait trouver sa balance entre les récitatifs, ritournelles, arias, lamentos et quelques splendides duos composés par Francesco Cavalli (1602-1676), digne héritier de Monteverdi.
Pierre-René Serna
(1) www.concertclassic.com/article/il-giasone-au-grand-theatre-de-geneve-opera-des-nations-cavalli-en-fete-compte-rendu
(2) www.concertclassic.com/article/erismena-de-cavalli-lopera-royal-de-versailles-caracterisation-et-animation-compte-rendu
Francesco Cavalli : Il Giasone – Versailles, 10 mars 2018.
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