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​La Belle Hélène à l’Odéon de Marseille – Embarquement pour la joie – Compte rendu

 
Une générale et deux représentations à guichets fermés : à l’Odéon de Marseille, temple de l’opérette sur la Canebière, ce sont ainsi 2400 personnes qui ont embarqué pour la joie à défaut de partir pour Cythère. Et s’il y avait eu deux ou trois représentations supplémentaires, elles auraient aussi été données à guichets fermés.
 
Prenez une – très – belle Hélène ; adjoignez-lui une joyeuse et talentueuse troupe, demandez à Bernard Pisani de signer mise en scène et chorégraphies, placez une vingtaine de musiciens de l’Opéra de Marseille dans la fosse et offrez-leur Didier Benetti comme directeur musical : vous comblerez assurément Offenbach et son public. Pour ces représentations, Bernard Pisani a retravaillé sa production de 2016, déjà reprise en 2020 avec respect des règles sanitaires alors en vigueur, pour en tirer, une fois de plus, le meilleur. On connaît la classe et le sens du détail du maître d’œuvre qui, ici, fait le maximum avec le minimum. Point de décors embarrassants mais l’essentiel sur ce plateau microscopique, et une attention toute particulière portée aux déplacements ainsi qu’aux chorégraphies. Il en résulte un spectacle joyeux, exempt de toute lourdeur et bigrement séduisant. Un lifting scénique des plus aboutis.

 

© Christian Dresse
 
 
Charme, séduction : Laurence Janot (photo) témoigne d’une classe folle et son passé de danseuse confère à son physique et à ses déplacements une grâce à nulle autre pareille. Elle possède la voix qui sied au rôle, maîtrisée, avec une pointe de maturité, des aigus lyriques et des graves profonds. Une très belle Hélène. À ses côtés, Carole Clin offre une délicieuse Bacchis ; quant à Perrine Cabassud et Sabrina Kilouli, elles sont de pétillantes hétaïres qui accompagnent Oreste, délirant Alfred Bironien, dans sa vie de débauche.
Le rôle de Pâris revient à Matthieu Justine (photo) : le ténor fait valoir une ligne de chant agréable, tout juste perturbée par quelques facéties vocales non nécessaires. C’est Marc Barrard, excusez du peu, qui campe Agamemnon. Du pain blanc que ce rôle pour le baryton nîmois, plus habitué aux grandes scènes lyriques, en totale maîtrise vocale et scénique. Il prend du plaisir – ça se voit et s’entend – et il nous en procure ! Impeccable, lui aussi, le Calchas de Philippe Ermelier fait valoir ses beaux graves d’oracle ; quant au Ménélas de l’inusable Jean-Claude Calon, il ne manque ni de naïveté ni d’humour, s’imposant dans un rôle joué avec justesse. Joris Conquet et Philippe Béranger, les deux Ajax, sont bien en place et avec l’Achille de Frédéric Cornille, grand échalas comique ; ils complètent idéalement la distribution à laquelle Antoine Bonelli, Philocôme, maître de la foudre jupitérienne participe sobrement, lumineusement et justement.

 

© Christian Dresse
 
Après un léger décalage initial, le chœur Phocéen s’est bien placé dans l’action apportant son jeu et ses voix à l’édifice. Quant à l’orchestre de l’Opéra qui habite la fosse « de chambre » de l’Odéon depuis le début de la saison, sous la direction détaillée de Didier Benetti, il a servi Offenbach avec de belles couleurs. Une mention, enfin, pour les danseuses et danseurs, Chloé Scalese, Lya Semenkova-Tobiass, Grégoire Lugue-Thebaud et Guillaume Revaud, qui ont su mettre leurs talents au service des sollicitations de Bernard Pisani dont il faut souligner l’intérêt qu’il porte à la danse classique. Bref, du bonheur pur ... Qu’il est dommage que deux représentations seulement aient été programmées, l’Odéon confirmant une fois de plus, si besoin était, sa position de place forte de l’Opérette en France.
 
Michel Egéa

 

 
Offenbach : La Belle Hélène - Marseille, Odéon de Marseille, 22 février 2025
opera-odeon.marseille.fr
 
© Christian Dresse

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