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La Lucerne Festival Academy à Pleyel - La jeunesse séduite par le bel aujourd’hui - Compte-rendu

Le Festival de Lucerne ne se contente pas d’inviter les plus grands chefs à diriger des concerts de prestige à la tête des meilleurs orchestres, mais il les incite à préparer l’avenir dans le cadre de son Académie, grâce à des stages destinés à de jeunes musiciens venus du monde entier. Pierre Boulez a toujours entretenu des rapports privilégiés avec ses jeunes collègues et si ses yeux défaillants l’ont amené à renoncer à diriger le concert des juniors dimanche 9 septembre à Pleyel, il avait tenu à les soutenir de sa présence dans la salle. Il eut tout lieu d’être satisfait du travail de préparation parfaitement abouti mené par l’un de ses anciens stagiaires de la session 2011 à Lucerne, le Britannique Clement Power (photo, né en 1980).

On est frappé par l’engagement total de ces jeunes dans Sound and Fury de Philippe Manoury, une pièce de 1999 dont on ne peut que louer les vertus pédagogiques propres à provoquer la cohésion des instrumentistes. Pierre Boulez qui avait décidé du programme n’a pu que se réjouir du résultat, d’autant que son ancien stagiaire Clement Power a adopté une gestique qui relève du mimétisme par rapport à celle du maître… La seconde pièce d’un compositeur vivant était Speakings du Britannique Jonathan Harvey, un habitué des laboratoires de l’IRCAM né en 1939, qui obligeait l’orchestre à se plier aux interventions de l’électronique.

Harvey y a recherché la part musicale de la langue parlée dont il use, non sans humour parfois, un peu à la manière d’un Messiaen et ses chants d’oiseaux, avec cette différence que la gent ailée, elle, chante bel et bien indépendamment des compositeurs ! La technique électronique apparemment sophistiquée ne nous a pas paru y tenir un rôle essentiel… ce qui n’est pas plus mal pour les jeunes instrumentistes très concentrés sur leur travail.

Un grand classique les attendait après l’entracte avec Erwartung où Schoenberg dit adieu au romantisme viennois et où l’on a le plus regretté l’absence de Boulez au pupitre : car au terme de son parcours musical le grand chef a singulièrement arrondi les angles de la direction « métronomique » que ses détracteurs lui reprochèrent dans ses années de révolte… Son assistant n’a pas su motiver les jeunes instrumentistes en leur révélant les secrets de l’alchimie sonore d’une pièce qui doit tant à l’esthétique du musée de la Sécession à Vienne. La soliste Deborah Polaski l’avait bien compris dont la robe paraissait jaillie d’une toile de Gustav Klimt ! Sa voix somptueuse manquait cruellement de l’assise instrumentale qu’aurait su tisser pour elle Pierre Boulez.

Jacques Doucelin

Paris, Salle Pleyel, 9 septembre 2012

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Photo : DR
 

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