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La Maîtrise Notre-Dame de Paris interprète Britten et Vaughan Williams – Mystère et jubilation – Compte-rendu
Troisième volet de l'ouverture de la saison de Musique Sacrée à Notre-Dame de Paris : après la musique médiévale sous la direction de Sylvain Dieudonné (1) et le premier récital d'orgue par Jean Guillou (2), la Maîtrise en grande formation proposait sous la direction d'Henri Chalet un programme dédié principalement à Britten – 40ème anniversaire de sa mort – et à Vaughan Williams. Le 18 novembre 2014 (3), lors de la prise de fonction d'Henri Chalet (photo) à la suite de Lionel Sow comme chef principal de la Maîtrise, un programme anglais avait offert un riche survol, de Byrd à Britten, de ce répertoire profondément ancré dans une tradition ininterrompue. C'est dans la continuité de ces « débuts » que s'est inscrit le concert du 4 octobre 2016, à la fois confirmation d'une orientation et consolidation en termes de répertoire à travers un approfondissement du domaine exploré : musique chorale anglaise toujours, a cappella ou avec accompagnement : Yves Castagnet à l'orgue de chœur, mais recentré sur le XXe siècle.
Henri Chalet ( à g. ) & Yves Castagnet (à dr. ) © DR
Du concert de 2014 fut reprise la disposition initiale, source de mystère et de poésie, Byrd cédant ici la place à John Tavener (1944-2013) : placée tout au fond du chœur, la Maîtrise fit entendre en guise de mise en condition spirituelle The Lamb (« L'Agneau », 1982), page a cappella d'une intense pureté, sur un poème de William Blake extrait de ses Songs of Innocence (1789), permettant d'apprécier d'emblée la souplesse, la densité mais aussi l'impressionnante longueur de souffle des voix de la Maîtrise – Chœur d'adultes, Jeune Ensemble et Chœur d'enfants, ce dernier dirigé par Émilie Fleury. S'ensuivit, les chanteurs ayant gagné la croisée, la première de quatre œuvres de Benjamin Britten (1913-1976) : Hymn to the Virgin (1930, révision 1934), a cappella et avec un chœur d'écho d'un effet raffiné. Créateur d'œuvres chorales d'envergure dans le contexte du fameux Three Choirs Festival (donné alternativement dans les cathédrales de Hereford, Gloucester et Worcester), également illustré par Vaughan Williams, Edward Elgar devait figurer dans ce programme : il y fut représenté par Lux aeterna (1899), page des plus originales et attrayantes, tout d'abord à bouches fermées avec le soutien de l'orgue, puis, une fois la mélodie mémorisée par l'auditoire, a cappella sur des versets de la messe des morts (Lux aeterna luceat eis, Domine).
Les deux splendides et festifs Jubilate Deo (sur le Psaume 100, 1934 et 1961) de Britten encadraient l'altière et concise Messe à double chœur en sol mineur de Ralph Vaughan-Williams (1872-1958), déjà entendue en 2014, dédiée à Gustav Holst et première messe (1922) à la manière véritablement anglaise depuis la Renaissance, puissamment a capella et comportant quelques interventions solistes – quatre chanteurs issus du chœur. Une œuvre aux facettes brillamment contrastées, et ainsi restituées par la Maîtrise, du flamboyant carillonnement de l'Amen qui referme le Gloria à la douceur extrême du Sanctus, l'écriture pour double chœur s'affirmant tout particulièrement dans un magistral Hosanna in excelsis. Un bonheur que de pouvoir réentendre ce chef-d'œuvre du répertoire choral anglais.
Ce fut sur l'une des œuvres les plus populaires de Britten que se referma ce concert intense et serein, dynamique et joyeux : Rejoice in the Lamb op. 30 (1943), sur un texte de Christopher Smart (1722-1771) et sous-titrée Festival Cantata : une cantate de fête – bien que de temps de guerre – portant on ne peut mieux cet intitulé. Le texte célèbre la présence divine en toute chose ou être vivant, qu'il s'agisse d'un chat, d'une souris ou d'un homme. Incantatoire, faisant appel à quatre solistes à part entière, ici toujours issus du chœur, avec comme souvent chez Britten une riche et inventive partie d'orgue, virevoltante (ainsi dans l'intervention de la soprano sur For I will consider my cat Jeoffry) et gratifiante, allant bien au-delà d'un simple accompagnement. Un jubilatoire enchantement sous les voûtes de Notre-Dame.
Michel Roubinet
Paris, cathédrale Notre-Dame, 4 octobre 2016
(1) www.concertclassic.com/article/ouverture-de-la-saison-musique-sacree-notre-dame-de-paris-chroniques-et-musiques-au-temps-de
(2) www.concertclassic.com/article/jean-guillou-notre-dame-de-paris-entre-creation-ininterrompue-et-tradition-symphonique
(3) www.concertclassic.com/article/henri-chalet-nouveau-chef-de-la-maitrise-notre-dame-de-paris-de-byrd-britten-coup-dessai
Musique Sacrée à Notre-Dame de Paris
www.musique-sacree-notredamedeparis.fr
Photos Henri Chalet © DR
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