Voici paru dans la collection musicale d’Actes Sud un livre accessible et bienvenu consacré par Renaud Machart à La Musique minimaliste, le premier en français précise l’auteur.
Bienvenu d’abord par ce qu’on y apprend et parce qu’on y révise. Les États-Unis des sixties, un peu de West Coast, beaucoup de New York ; la fécondité d’un courant qui prend sa source dans les arts plastiques et s’en vient irriguer le terroir typiquement américain d’une musique émancipée de l’héritage romantique européen ; le parcours des grandes figures historiques : La Monte Young et Terry Riley, Steve Reich et Philip Glass, où s’immisce en permanence la personnalité de leur cadet John Adams – sur qui l’auteur a beaucoup écrit – lequel, sans expressément appartenir au mouvement « minimaliste » qu’en France on dénomme volontiers « répétitif », en a été un pisteur et un compagnon de route.

Bienvenu ensuite par son informelle seconde partie s’intéressant aux Ancêtres, cousins et héritiers, qui noue des liens entre ici et là-bas, ravive la mémoire et, surtout, nous incite à écouter ou réécouter : Ingram Marshall (fantastique Fog Tropes, 1981), Laurie Anderson, Michael Nyman et Gavin Bryars ; voire à s’essayer au piano de William Duckworth (dont Bruce Brubaker est un interprète inventif) ou de tenter l’immersion risquée dans l’œuvre de Jean Catoire (à qui le Festival Musica 2023 a consacré une nuit infinie).

Livre réjouissant enfin grâce à la plume de Renaud Machart – on y apprend que Phil Glass fut un plombier efficace et que Steve Reich est sans doute un peu plus susceptible que la moyenne ; une plume aiguisée parfois comme une pique, on connaît l’intolérance de l’auteur à « l’avant-garde » – si tant est que la formule ait encore un sens aujourd’hui – notamment sérielle, et sa jubilation à appeler un chat un chat et de vieilles pelotes un mauvais tricot. On entend bien avec lui que le trio Adams – Glass – Reich ne relève pas du classement alphabétique mais constitue le podium de la course de l’America…
Qu’on ait ou non les mêmes sensibilités ou les mêmes allergies, cela ne change rien au plaisir de lecture, un peu visite d’une galerie d’art downtown et beaucoup invitation à dresser des playlists.