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La Walkyrie à l’Opéra Bastille - Rafraîchissement relatif - Compte-rendu
Oui, Günter Krämer a revu sa copie pour Walküre, Notung n’est plus à la même place, l’action est constamment à l’avant-scène, ce qui souligne encore une fois le propos didactique, principale et quasiment unique qualité de cette régie univoque, assez terne même si l’on sentait le metteur en scène plus impliquée dans la direction d’acteur.
Mais parfois les changements minorent son propos, comme durant la Chevauchée : la disparition des tables où les Walkyries lavaient les morts enlève le rythme de l’ensemble, et l’impossible bataillon de chasseurs finlandais met sa pitoyable chorégraphie martiale tout en avant de la scène, rendant l’action peu claire au point qu’on ne voit pas surgir Sieglinde. Sieglinde, c’est Martina Serafin qu’on avait peu goûtée en Floria Tosca mais qui la soirée durant nous a émerveillé par la beauté de son chant – elle ne renonce pas à son art straussien, une ombre de Maréchale passe sur sa voix, paradoxe elle n’est jamais incongrue appliquée à l’écriture wagnérienne - et par la vérité de son personnage. D’ailleurs les Wälsungen sont gâtés, Stuart Skelton campant un Siegmund ardent et pourtant fragile mais pas vocalement : ses aigus sont dardés, ses « Wälse ! » profonds, intenses, évitant le cri pour mieux invoquer, la ligne toujours musicale sinon le timbre absolument séduisant. Rien que des lauriers pour le Hunding de Günther Groissbock, basse à la Ridderbusch qui mord dans ses mots et joue la brute totale : on adore. L’autre miracle de la soirée, c’est la Fricka de Sophie Koch, implacable sans hystérie, déesse avant tout, qui semblait marcher dans les traces de Christa Ludwig, noblesse de ligne, clarté des mots, éloquence du timbre, un modèle.
Hélas le Dieu et sa créature n’étaient pas de la même eau : Durant tout le II Egils Silins campait un Wotan absent, physiquement, mais aussi vocalement ; il se reprenait au III, mettait de la noblesse à son personnage et à son chant, sans pourtant parvenir à nous faire partager ses ires. Sans doute Brünnhilde vient un peu tôt dans la carrière d’Alwyn Mellor. Ce ne sont pas les aigus qu’on lui chicane, mais bien le medium où se joue une grande part du rôle, et de l’incarnation. Mais qu’elle est bonne fille et vaillante ! On la suivra. Des Walkyries bien appariées emmenaient la chevauchée malgré un Philippe Jordan prudent, qui confondit la soirée durant lenteur et profondeur, peu aidé par un orchestre qu’on sentait fatigué, peu impliqué et en sonorités rêches.
Jean-Charles Hoffelé
Wagner : La Walkyrie - Paris, Opéra Bastille, 20 février, prochaines représentations : 24 et 28 février, 3, 6 et 10 mars et 19 juin 2013
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Photo : Opéra national de Paris/ Elisa Haberer
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