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"L’Après-midi d’un faune, Vaslav Nijinski", texte de Thierry Malandain – Décryptage d'un mythe chorégraphique – Compte rendu

 
Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le fameux Faune mis en pas par Nijinski et tant d’autres…Lifar, Robbins, etc. Mais ne vous y fiez pas : ce petit livre, léger dans la poche, mais dense comme un vieux Que Sais-je, n’est pas fait pour la sieste sous un arbre. Les humeurs en sont diverses : d’abord parce que l’essentiel repose sur la démarche que Thierry Malandain lance vers l’un de ses plus grandioses prédécesseurs, l’insaisissable Vaslav Nijinski, chorégraphe et interprète de l’Après-midi d’un Faune, le 30 mai 1912, avant cette autre bataille d’Hernani que déclencherait son Sacre du Printemps, un an après. Et que le subtil Malandain n’est pas toujours facile à décrypter : son texte, furieusement documenté et brûlé d’une véritable passion, part en spirales, informe abondamment, mais donne parfois le vertige tant il oblige la sensibilité moyenne à se mettre à l’aune des affres de l’acte créateur. Et là, le chorégraphe et écrivain de Biarritz est maître, par sa plume incisive, ironique, nourrie de ses multiples recherches, mais aussi ultra sensible, à la fois poétique et saignante, tant les foudroyantes tentatives de Nijinski l’habitent et lui sont perceptibles. Texte prenant, dérangeant, parfois bouleversant, notamment lorsqu’il évoque, se confiant, « l’emmurement dans les dédales d’un autre monde mental. » 

 

 
 
Il  faut donc une attention soutenue pour pénétrer dans les arcanes de cette puissante quête onirique. Mais comme le livre est l’œuvre d’un quatuor, mené de haute main par Malandain, qui y est soutenu par trois complices, voici ensuite de quoi prolonger le propos sous un autre angle: d’abord avec une solide interview, due à la journaliste Bérengère Alfort, qui questionne Charles Jude, l’un des plus beaux faunes de l’Opéra de Paris. L’interprète raconte avec profondeur autant que simplicité comment il a mis ses pas dans les sabots du Mythe. Ensuite viennent trois courts textes parfaits de netteté, de vivacité, truffés de repères historiques : ils sont l’œuvre du brillant historien et écrivain de danse Philippe Verrièle, par ailleurs directeur de la judicieuse petite collection Chefs-d’œuvre de la danse, où paraît le livre. Tout est dit de ce qui pouvait l’être, reste à revoir le ballet d’origine d’un œil plus éveillé, et à se reposer les questions…Les inconnues du Faune n’en sont plus que plus excitantes.
 

Jacqueline Thuilleux
 

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L’Après-midi d’un Faune, Vaslav Nijinski, par Thierry Malandain, avec la participation de Philippe Verrièle, Bérengère Alfort et Charles Jude, 95 pages, 10 illustrations, 12€, Nouvelles éditions Scala
 

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