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​Le Disque la Semaine – Adrien La Marca joue Walton, Grisi et Prokofiev (La Dolce Volta) : Un archet de conteur – Compte-rendu

Plutôt que de choisir Brahms, Schumann ou d’autres noms archi-rebattus, Adrien La Marca signait en 2016 un premier disque (1) on ne peut plus original, tout britannique, bâti autour de la splendide mais bien méconnue Sonate pour alto et piano de Rebecca Clarke. Un véritable coup de maître, merveilleusement accompagné par l’excellent Thomas Hoppe ! Pas moins singulier, le premier enregistrement avec orchestre de l’altiste français mise à nouveau, pour une large part, sur le répertoire d’outre-Manche et sur la rareté. (2)
 

W. Walton : Concerto pour alto Andante comodo (ext.)

Il n’y a pas qu’Harold en Italie dans la vie d’un altiste ! Sachons gré à Adrien La Marca de s’être emparé du Concerto pour alto de Sir William Walton (1902-1983). L’ouvrage n’encombre pas les programmes de nos phalanges symphoniques (tellement occupées par leurs sempiternels Beethoven, Brahms, Mahler et Chostakovitch s’agissant du répertoire non français), et pourtant il constitue bien l’un des chefs-d’œuvre absolus de la littérature de l’instrument, écrit en 1928 (3) à l’intention de Lionel Tertis. Dérouté par l’ouvrage qui s’offrait à lui, ce dernier refusa d’en assurer la création, décision qu’il devait ensuite regretter « with shame and contrition » – on le comprend ...  La première se tint dès l’année suivante à Londres, avec Paul Hindemith et le Henry Wood Symphony Orchestra dirigé par l’auteur.
 

W. Walton : Concerto pour alto Vivo, e molto preciso (ext.)
 

© Marco Borggreve
 

W. Walton : Concerto pour alto Allegro moderato (ext.)

Cantabile espressivo note Walton à l’entrée du soliste dans l’Andante comodo initial. Il se mue en un Once upon a time sous l’archet d’un interprète dont le sens narratif saisit d’emblée l’auditeur, tout comme la parfaite complicité avec l’Orchestre Philharmonique Royal de Liège et Christian Arming. Pas une mesure de virtuosité gratuite dans la partition, pas un effet facile de la part de la Marca, lové dans une musique qu’il explore avec une intensité expressive et un sens de l’image pour le moins irrésistibles, aussi admirable dans les premier et dernier mouvements, aux tempi modérés, que dans le Vivo central, un scherzo servi avec une netteté d’attaque et une qualité d’intonation irréprochables.
 

G. M. Grisi : On the Reel (ext.) 

L’altiste a bien raison de rappeler (dans l’interview qui accompagne le CD) la relation essentielle de Walton avec le cinéma (une bonne douzaine de réalisations au total, dont Battle of Britain, Hamlet et Richard III). Cet aspect l’a d’ailleurs orienté dans la construction d’un programme que prolonge une pièce concertante (de 2019) de Gwenaël Mario Grisi, jeune compositeur belge (né en 1989 comme La Marca) très attiré lui aussi par la musique à l’écran. D’une vingtaine de minutes (avec une longue et belle cadence), On the Reel (Sur la Bobine) offre une transition idéale vers la conclusion russe du CD : des orchestrations (signées Jean-Pierre Haeck) de pages tirées du Roméo et Juliette de Prokofiev et adaptées pour alto et piano par V. Borisovsky (altiste fondateur du Quatuor Beethoven).
De Walton à Prokofiev, nul hiatus dans l’enchaînement d’œuvres qu’un de nos très grands archets sert avec une autorité et une imagination sonore pour le moins renversantes.
 

Prokofiev/Borisovsky/Haeck : Roméo et Juliette - Danse des Chevaliers (ext.)
 
L’actualité d’Adrien La Marca n’est pas que discographique : samedi 31 octobre, dans le cadre du Festival La Dolce Volta, on le retrouve sur la scène des Bouffes du Nord à Paris, au côté de Théo Fouchenneret, pour un bel et généreux programme mêlant musique de chambre et piano solo.
 
Alain Cochard

(1)         « English Delight », La Dolce Volta, LDV 22

(2)         « Heroes », œuvres de Walton, Grisi, Prokofiev, La Dolce Volta LDV 75

(3) L’orchestration du Concerto pour alto fut révisée – et allégée – par Walton en 1961
 
Adrien La Marca et Théo Fouchenneret au 3ème Festival La Dolce Volta
Paris, Théâtre des Bouffes du Nord, 31 octobre 2020 (15h) // www.festival-ladolcevolta.com/theo-fouchenneret-adrien-la-marca/
 
Photo © Marco Borggreve

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