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Le Songe d’une nuit d’été de Balanchine à l’Opéra de Paris - Prélude au sommeil - Compte-rendu
Style banalement académique, pantomime lisible au tout premier degré, variations insipides qui s’enchaînent presque mécaniquement, et dans cette débauche de figures classiques, aucun geste signifiant qui puisse évoquer la portée de l’œuvre, aucune descente inspirée dans le charme de cette nuit magique : rien par exemple qui suggère l’érotisme à la fois trouble et léger de la dispute des deux elfes pour la possession d’un enfant, ou le duo un rien osé de Titania avec l’âne Bottom. Tout est lisse et brillant comme un cristal de Swarovski, auquel cette production doit beaucoup de son éclat !
Et s’il y a charme, donc, c’est au travail de Christian Lacroix qu’on le doit, bien qu’il ait dû se conformer aux anciennes maquettes de la grande dame qu’était Karinska, qui œuvra à New York pour la création du ballet. Le créateur s’adonne ici aux plus doux, aux plus rutilants de ses rêves, qu’il déploie en de scintillantes étoffes, délicates mousselines, pour figurer ailes de papillon et autres fantasmagories joyeuses. Un régal qui comble l’œil et aide à se consoler de ce que l’esprit soit si peu sollicité, sans parler d’un décor de forêt opulent où les bleus et les verts évoquent lointainement les alliances osées de Bakst, dont Lacroix peut se dire le disciple, mais sans ses moiteurs troubles.
Bonne interprétation, où s’inscrit en premier la famélique et racée Titania d’Eleonora Abbagnato, laquelle illumina jadis la version Neumeier, jolis couples Hermia-Laetitia Pujol, Lysandre -Alessio Carbone, et pour Héléna, l’expressive Fanny Gorse, face au rude Démétrius d’Audric Bezard. On note aussi la présence d’un Oberon peu connu du public, Paul Marque, de belle stature, et du coryphée Hugo Vigliotti en gentil Puck, car Balanchine a conçu ce spectacle comme une fête de (riche) lycée. Tout autour, une ribambelle d’enfants bondissants et réjouis, spirituellement costumés par Lacroix comme des lutins de cirque.
Dans la fosse, Simon Hewett – habitué des productions de ballet – à la tête de l’Orchestre de l’Opéra dirige la musique de Mendelssohn avec ardeur et vivacité, mais sans une once de poésie. Décidément pas de petits pieds nocturnes foulant les mousses sylvestres, dans ce Songe d’une nuit d’été sans rêves, comme l’illustrateur Arthur Rackham sut si bien les faire naître en 1909 dans ses délicats et frémissants dessins. Autre génie…
Jacqueline Thuilleux
Photo © Agathe Poupeney /Opéra national de Paris
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