Le 29 septembre 1915, un jeune compositeur allemand de vingt-sept ans tombait sous les balles russes sur le front de Galicie.
Rudi Stephan laisse une œuvre ténue dominée pour une étrange Musique pour orchestre désolée et par une autre partition aussi intitulée sobrement Musique pour sept instruments à cordes écrite en 1911 pour un alliage peu courant : deux violons, un alto, un violoncelle, une contrebasse, une harpe et un piano. Vingt-quatre minutes d’une musique aux alliages surprenants, à l’invention harmonique étrange, qui s’approche du langage des symphonies de chambre signées Schreker ou Schoenberg avec en plus une nudité du discours, une tension des phrasés, quelque chose de plus abstrait.

Karine Lethiec © Jeff Ropars

C’est avec cet opus quasiment jamais entendu en France que Karine Lethiec et ses amis de l’Ensemble Calliopée (photo) – en résidence au musée de la Grande Guerre depuis trois ans -  ouvriront leur concert centré sur le carnage de la Première Guerre Mondiale auquel l’actualité offre un écho glaçant.
Sinistre, Le Gibet du Gaspard de la nuit de Ravel assumé par Frédéric Lagarde, étrange et trop méconnu le Poème pour violon, alto et piano (1920) de Lucien Durosoir, ami de Caplet, outsider de la vie musicale française (qui a déjà été beaucoup défendu en concert comme au disque (1) par Calliopée), précéderont le Quintette KV 581 de Mozart avec la clarinette élégiaque de Patrick Messina.

Après les crimes de masse du vendredi 13 septembre, Karine Lethiec ne pouvait que reprendre l’In Terra Pax que Fabrice Gregorutti (né en 1960) avait écrit pour l’Ensemble Calliopée et qui avait été créé à l’Unesco voici une année. Que cette prière soit entendue.

Jean-Charles Hoffelé

(1) pour le label Alpha

Ensemble Calliopée, dir. Karine Lethiec
Œuvres de Stephan, Ravel, Durosoir, Gregorutti, Mozart
5 décembre – 19h
Meaux – Musée de la Grande Guerre du Pays de Meaux
www.museedelagrandeguerre.eu
 
 
Site de l’Ensemble Calliopée : ensemblecalliopee.com

Photo Ensemble Calliopée © Jeff Ropars