Singulier moment de musique et magnifique rencontre entre des univers esthétiques a priori éloignés - a priori seulement - que le concert donné par l’Ensemble de Caelis (un formation à cappella constituée de cinq voix de femmes, dont celle de Laurence Brisset, sa directrice), le 9 avril dernier à l’église évangélique de la rue blanche à Paris. Le rendez-vous se tenait à l’occasion de la sortie (chez L’empreinte digitale) d’un CD intitulé « GEMME » (1) réunissant des pièces d’Hildegard von Bingen et de Zad Moultaka (né en 1967). Un pur bijou discographique dans la lignée des publications originales et exigeantes auxquelles nous a habitué le label dirigé par Catherine Peillon.
 
On était curieux de découvrir en concert le programme du disque ; on n’en a que mieux goûté les qualités de De Caelis et la pertinence de la démarche menée avec Zad Moultaka. La justesse d’intonation des cinq chanteuses stupéfie, tout comme leur homogénéité, mais il n’est pas une once de froideur dans leur interprétation. Perfection, mais perfection habitée, toujours portée par un souffle, un engagement qui permettent au programme, savamment construit, de toujours exercer son plein impact. Difficile de décrire par les mots l’expérience troublante à laquelle convie le dialogue entre la musique de Von Bingen et l’imagination du compositeur libanais qui, à partir du milieu du programme, accompagne avec l’électronique – d’abord très discrètement - des pages issues d’un passé lointain, puis s’en empare de manière saisissante, avant qu’on ne débouche in fine sur trois pièces de sa composition ( Ubi es I, II & III) - créées en juillet 2014 à l’Abbaye aux Dames de Saintes. « Et si les visions et les voix d’Hildegard se manifestaient pour lui décrire l’état du monde quelque mille années plus tard, interroge Moultaka ? » Résultat proprement envoûtant, le mot est faible.
 
Un tel concert ne rend que plus curieux des prochaines apparitions de l’Ensemble de Caelis. En prélude à un programme mêlant la musique médiévale à une création de Philippe Hersant, le 27 septembre prochain à Fontevraud, Laurence Brisset et ses partenaires invitent à un concert « Fenêtre sur Philippe Hersant » le 9 mai dans le cadre d’une résidence au Centre Voce de Pigna (Corse). Il n’est plus besoin de revenir sur les affinités de De Caelis avec l’univers du compositeur français - l’ensemble est à la fois commanditaire, dédicataire et créateur de ses Prophéties des Sybilles (2010, création 2011).
 
Changement d’univers, mais proposition non moins séduisante, le 15 mai, à la Chapelle d'Ecault de Saint-Etienne-au-Mont, dans le Boulonais. Placé sous l’égide du Château d’Hardelot-Centre culturel de l’Entente cordiale, ce concert est dédié à des pages anglaises des XIIIe et XIVe siècles et conduit les cinq chanteuses à collaborer avec quatre jeunes collègues issues de la classe de chant du CRR de Boulogne-sur-Mer.
 
Alain Cochard
 
(1) L’Empreinte digitale, 1CD ED 13241
 
« Fenêtre sur Philippe Hersant »
9 mai 2015 – 18h30 (entrée libre)
Pigna – Corse
http://www.centreculturelvoce.org
 
Musiques anglaises des XIIIe et XIVe siècle
15 mai 2015 – 20h (entrée libre)
Chapelle d’Ecault - Saint-Etienne-au-Mont
http://www.chateau-hardelot.fr/Agenda/Effet-de-Manche-De-Caelis
 
Sites internet
 
- Ensemble de Caelis : www.decaelis.fr
- Zad Moultaka : www.zadmoultaka.com
- Philippe Hersant : www.philippehersant.com

Photo © Guy Vivien