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Les « baby-boomers » fêtés
De triennal depuis sa création en 1994, le festival « Les Paris de la Musique » devient annuel à compter de cette année. Mais il demeure plus que jamais fidèle à l’esprit de l’association Musique nouvelle en liberté, son initiatrice. Du 27 septembre au 21 octobre, la musique d’aujourd’hui noue un fructueux dialogue avec des œuvres du répertoire.
Il y quinze ans exactement, « Musique nouvelle en liberté » naissait à l’initiative de Marcel Landowski, avec le dessein de soutenir l’exécution d’œuvres contemporaines insérées dans des programmes plus traditionnels. Cette technique du « sandwich » aura permis à des publics qui ne seraient jamais allés vers des concerts entièrement contemporains, d’entrer en contact avec ce répertoire. Pragmatique – au risque de choquer quelques snobs qui considèrent comme honteux qu’un organisateur de concerts ait aussi des préoccupations économiques. Car Vivaldi, Haendel, Mozart ou Beethoven n’en avaient pas bien entendu, eux…–, la démarche se révèle très pédagogique aussi en raison du dialogue qu’elle permet de nouer entre passé et présent.
Rien de nouveau d’ailleurs dans ce procédé. Un seul exemple : le 30 mai 1929 à la Salle Gaveau, Gaston Poulet dirigea la création mondiale d’Amazonas de Villa-Lobos et la première européenne d’Amériques de Varèse en mêlant ces ouvrages quelque peu « décoiffants » à une suite de Bach et au 20ème Concerto pour piano de Mozart (par Magda Tagliaferro).
Depuis quinze ans, Musique nouvelle en liberté apporte son aide à la création (ou à la reprise, c’est là une autre aspect très important de son action) de partitions d’aujourd’hui et ce s’agissant d’auteurs de générations et d’esthétiques très différentes.
L’édition 2006 des « Paris de la musique », tout en restant ouverte à une large palette de styles, a toutefois pris le parti de mettre d’abord l’accent sur des auteurs de la « génération Baby-boom ». « Héritiers pour une part de l’avant-gardisme des années cinquante, remarque Benoît Duteurtre (photo), Directeur de Musique nouvelle en liberté, précurseurs pour quelques-uns de la révolution tonale des années quatre-vingt-dix, ils ont ouvert leurs voies singulière entre ces deux jalons ». Ainsi Philippe Manoury, Pascal Dusapin, Tristan Murail, Denis Levaillant, Valéry Arzoumanov, Philippe Hersant, Edith Canat de Chizit ont-ils été retenus à côté de trois auteurs précocement disparus hélas : Gérard Grisey, Olivier Greif et Jean-Louis Florentz. C’est n’est cependant là qu’une dominante, qui n’exclut pas la présence d’auteurs plus âgés tels que Gilbert Amy - dont Jean-Quihen Queyras donne le Concerto pour violoncelle en ouverture des « Paris de la musique », avec l’Orchestre de Paris dirigé par l’auteur - ou encore Aulis Salinnen, pas plus que celles de plus jeunes auteurs : Anthony Girard, Eric Tanguy et Thierry Pécou. De ce dernier, on attend avec impatience la création d’un concerto pour piano sous les doigts d’Alexandre Tharaud, au cours d’une soirée comprenant par ailleurs la création d’un concerto pour harpe (intitulé « Le Tombeau de Virgile ») de Philippe Hersant par Isabelle Moretti (avec l’EOP et le chef britannique Andrea Quinn). Concentrée dans la capitale, la manifestation ne se cantonne cependant pas à une seule salle. Gaveau (8 des 12 concerts) domine certes, mais Pleyel, le TCE et Radio France sont également dans le jeu.
Du quatuor à cordes à l’orchestre symphonique, en passant par des ensembles tels que L’itinéraire ou Accroche Note, le festival de Musique nouvelle en liberté présente une programmation contrastée. A lui seul, le concert que Claire Gibault (dont les apparitions à Paris sont hélas bien trop rares !) dirige à la tête de l’Orchestre Colonne le 10 octobre (en compagnie de la claveciniste Elisabeth Chojnacka et du baryton Jacques Loiseleur des Longchamps) résume l’esprit des « Paris de la Musique » : Concerto pour clavecin amplifié de François-Bernard Mâche, Concert champêtre de Poulenc, Symphonie n°1 pour voix et orchestre d’Olivier Greif et Suite de Pulcinella de Stravinski.
Voilà ce qui s’appelle du pluralisme !
Alain Cochard
Photo : Bettina Rheims
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