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L’Orchestre de Pittsburgh / Perahia et The Academy of St Martin in the Fields - Contraste total - Compte-rendu
Les soirées se suivent mais ne se ressemblent pas salle Pleyel. L’Orchestre de Pittsburgh est certes une belle machine américaine appartenant au groupe des cinq grandes phalanges d’outre-Atlantique : mais même les sommets obéissent aux lois de la hiérarchie. Ainsi Pittsburgh n’a pas le chic de Chicago, ni la patine vieille Europe de Boston ou Cleveland, et le moteur a tendance à vrombir avec délice. Dans le subtil 4ème Concerto pour piano de Beethoven, la baguette autrichienne de Manfred Honeck est impuissante à sortir les musiciens de leur salle de musculation… Ce qui accuse inutilement les contrastes, surtout au regard du jeu « à la surface du clavier », presque timide, en tout cas, terriblement scolaire d’Hélène Grimaud. Pas de style côté orchestre, pas de profondeur côté piano, ceux-là ne risquaient pas de se croiser ! Pas si bête, le public a failli oublier de rappeler la soliste pour la cérémonie du bis…
La 5ème Symphonie de Tchaïkovski qui constituait la seconde partie du programme permet de sortir les muscles sans démériter. L’Orchestre y démontre sans difficulté sa cohésion et la solidité de solistes à leur affaire dans la peinture d’une fresque haute en couleur. On reprochera seulement au chef de n’avoir pas dosé avec assez de subtilité la furia de ses musiciens ni veillé à la cohérence de l’architecture d’un chef-d’œuvre arraché de haute lutte à l’imagination du compositeur.
Le lendemain, c’est l’élégance dans la perfection et la liberté qui montent sur la scène de Pleyel avec The Academy St Martin in the Fields et Murray Perahia : de la musique, que de la musique ! D’abord, le programme de la soirée est en soi un modèle d’intelligence sensible : en ouverture celle d’Alcina d’un Haendel tant admiré par Mozart dont va suivre un 27e Concerto pour piano d’anthologie, qui ouvre les portes de l’avenir à l’orée de cette année 1791, la dernière de Mozart. Grâce à Perahia, le ciel est à portée de main.
En seconde partie, le Concerto pour clavier en fa mineur BWV 1056 de Bach affirme crânement la volonté du pianiste et de ses musiciens de se passer des diktats des baroqueux. Ils ne sont pas sourds pour autant, ils ont même l’oreille collée aux recherches des tenants de la musique à l’ancienne pour réaliser la plus joyeuse synthèse des deux tendances : presque pas de vibrato. Mais quand il faut chanter, comme dans le sublime Largo qui répond au Larghetto du Concerto de Mozart, Perahia est là et bien là. Chef de la Symphonie n°101 « L’Horloge » de Haydn, il saura comme personne dire adieu au siècle des Lumières et annoncer le monde nouveau. Tant d’intelligence et de culture font de lui le successeur tout à la fois de Rudolf Serkin et de Bruno Walter.
Jacques Doucelin
Paris, Salle Pleyel, 7 et 8 septembre, 2011
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Photo : DR
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