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Maîtrise Notre-Dame de Paris et Maîtrise de Radio France à Notre Dame – L’Allemagne et le Grand Nord - Compte-rendu

Initiée le 22 mars 2011 lors d'un programme de musique française du XXe siècle (1), réitérée à l'occasion d'un somptueux Miroir de Jésus d'André Caplet le 17 juin 2014 (2), la féconde rencontre musicale de la Maîtrise Notre-Dame de Paris, alors sous la direction de Lionel Sow, aujourd'hui sous celle d'Henri Chalet, et de la Maîtrise de Radio France se poursuit cet automne, dans un répertoire très différent que l'on imagine en partie inspiré de la Scandinavie natale de Sofi Jeannin (3), directrice musicale de la Maîtrise de Radio France depuis 2008 (4).

Le Chœur d'adultes de Notre-Dame © Jean-Baptiste Millot
 
Intitulé Influences : l'Allemagne et le Grand Nord, le programme alternait pièces pour chœur – en l'occurrence le Chœur d'adultes de la formation de Notre-Dame et le Chœur de chambre de celle de Radio France – a cappella ou avec accompagnement d'orgue : Yves Castagnet à l'orgue de chœur de la cathédrale. Comme presque de tradition, la première pièce fit entendre les voix seules tout au fond du sanctuaire : Abendlied, œuvre de prime jeunesse (1855 – il avait quinze ans) de Josef Rheinberger. Toute la fraîcheur d'un pur romantique, et un métier déjà solidement forgé. Sofi Jeannin poursuivit avec Hvad est du dog skjøn (Psaume op. 74 n°1, 1906) d'Eduard Grieg, d'une sobriété se doublant d'une flamme de belle venue, ainsi dans les interventions du baryton solo, Nicolas Rouault ; Stjärntändningen (1922) du compositeur suédois Oskar Lindberg ; enfin Benedictio (1991) de l'Estonien Urmas Sisask (né en 1960), pièce d'une vive séduction, sur une basse obstinée magnifiquement restituée, point de départ d'une montée en puissance dans laquelle l'œuvre trouve une énergie aussi serrée que formidablement souriante. Superbe. Cette partie a cappella dirigée par Sofi Jeannin se refermait sur O Crux (op. 79, 1977) du compositeur norvégien Knut Nystedt, disparu presque centenaire l'année dernière.

© DR
 
L'influence germanique, nombre de compositeurs scandinaves ayant réalisé ou parachevé leur formation dans les grands centres musicaux d'Allemagne, s'exprima à rebours du temps dans les deux œuvres suivantes, signées Mendelssohn : Veni Domine et Laudate Pueri, soit les deux premiers des Trois Motets pour voix de femmes et orgue op. 39 de 1837 (5), eux-mêmes sous l'influence du séjour romain du compositeur – et donc en latin : resplendissante et pure fusion des pupitres féminins des maîtrises, dont trois solistes en dialogue avec le chœur. Une ultime page de Mendelssohn s'ensuivit, renouant avec la langue allemande : Richte mich, Gott, deuxième des Trois Psaumes pour soli et double chœur op. 78 (Psaume 43, 1844), nourri de puissants contrastes entre voix féminines et masculines, d'une ferveur dynamisée par la direction ample mais toujours tonique et d'une absolue clarté d'Henri Chalet.
 
Au jeune Brahms revint le privilège de refermer ce programme : tout d'abord avec les Kyrie, Sanctus et Agnus Dei de la rare Missa canonica, publiée à titre posthume (WoO 17/18, 1856-1857), dans lesquels le compositeur rechercha une communion d'esprit avec l'austère grandeur romaine d'un Palestrina : la puissance de l'épure, suivis du Geistliches Lied op. 30 contemporain – sa première œuvre chorale conservée. La dernière phrase de la strophe initiale – on venait d'apprendre le nouvel attentat de Tunis – donna beaucoup à penser, à ressentir : « Pourquoi veux-tu aujourd'hui te soucier du lendemain ? ». Comme on aimerait pouvoir. Ce concert choral d'une intense et si musicale élévation fut, sinon un défi, bien entendu, du moins l'inépuisable confirmation de ce que l'être humain peut puiser dans la communion des voix, véritablement d'un même cœur, pour un vivre ensemble conscient et choisi, illuminé par la musique – dont nous ne saurions et ne voulons nous passer.
 

Michel Roubinet

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Paris, cathédrale Notre-Dame, 24 novembre 2015
 
 
(1) www.concertclassic.com/article/maitrise-de-radio-france-maitrise-notre-dame-une-purete-hors-du-temps-compte-rendu
 
(2) www.concertclassic.com/article/le-miroir-de-jesus-de-caplet-sous-la-direction-de-sofi-jeannin-notre-dame-de-paris-un-chef
 
(3) Beau portrait de la musicienne : www.liberation.fr/ecrans/2014/11/16/sofi-jeannin-dame-de-choeur_1144223
 
(4) Enregistré par Radio France, ce concert sera diffusé sur France Musique, le 6 janvier 2016 à 14 heures, dans l'émission de Dominique Boutel Le concert de l'après-midi – à réécouter de préférence dans une douce pénombre, plus propice à un tel programme que la pleine lumière du jour…  
www.francemusique.fr/emission/le-concert-de-l-apres-midi
 
(5) Ce triptyque figure sur le premier CD paru, en 2010, sous le label de la cathédrale : Maîtrise Notre-Dame de Paris 001
www.musique-sacree-notredamedeparis.fr/#!mendelssohn--rheinberger--brahms/cnqj
 
 
Sites Internet :
 
Musique Sacrée à Notre-Dame de Paris – Concert du 24 novembre 2015
www.musique-sacree-notredamedeparis.fr/#!mardi-24-novembre-2015--20h30/coes
 
Maîtrise de Radio France
maisondelaradio.fr/concerts-classiques/maitrise-de-radio-france
 
  
Paris, cathédrale Notre-Dame, 24 novembre 2015

Photo Sofi Jeannin © Christophe Abramowitz

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