C’est un défi, et considérable, mais que Nicolas Joel n’aurait pas relevé si Matthias Goerne ne l’avait pas assuré qu’il serait Mathis. Qui d’autre aurait pu, après Fischer-Dieskau, rendre justice à ce personnage tourmenté ?

Pris dans un imbroglio doublement ironique, Paul Hindemith (1895-1963) fut privé de la création de son opéra par une maladresse de Furtwängler qui avait fait du compositeur le parangon de la liberté de penser malgré le régime nazi en publiant une tribune dans la Deutsche Allgemeine Zeitung du 25 novembre 1934 intitulé « Le cas Hindemith ». Alors même que le compositeur avec ce sujet historique et surtout absolument germanique, espérait regagner les grâces du régime qu’il avait perdues en choquant Hitler avec sa femme nue de Neues von Tage, il se retrouva une fois de plus hors course. L’opéra de Zürich prit le relais, et Mathis y fut créé avec un succès retentissant le 28 mai 1938. L’œuvre dépeint la vie de cet artiste connu par un unique chef-d’œuvre, le Retable d’Isssenheim, confronté à la terrible guerre des paysans qui ravagea l’Allemagne.

Depuis, l’œuvre n’a reparu que par éclipses au cours des années 50, à Hambourg, Berlin, Vienne, Strasbourg (où on la donna dans une épouvantable traduction française), puis connut un second revival durant les années 80 sur les scènes de Gand, Düsseldorf pour revenir à Zürich.

A la Bastille, Christoph Eschenbach sera dans la fosse, et Olivier Py à la régie. Que choisira Pierre-André Weitz, la couleur comme pour sa récente Lulu genevoise, ou le noir et blanc auquel il vient de retourner pour un Roméo et Juliette à l’Opéra des Pays-Bas ?
Réponse à partir du 16 novembre.

Jean-Charles Hoffelé

Paul Hindemith : Mathis le peintre
Paris - Opéra Bastille

Les 16, 19, 22, 25 et 28 novembre, puis les 1er, 3 et 6 décembre 2010

Rens. : www.operadeparis.fr

Pour en savoir plus sur Paul Hindemith : www.paul-hindemith.org

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