La Fondation Royaumont fête ses 60 ans. Depuis les années 80, sous l’impulsion de Francis Maréchal (à la tête de l’institution à compter de 1977) la musique et le chant y occupent une place de premier plan. En ce domaine, mélodie et lied, qu’il s’agisse de leur enseignement ou du concert, font l’objet d’une attention particulière. Rien d’étonnant donc à ce que ces deux aspects du répertoire vocal s’illustrent au cours du Festival de Royaumont 2024 qui, quatre semaines durant (7 sept – 6 octobre), présente comme de coutume une affiche très diversifiée, du baroque à la création, musicale aussi bien que chorégraphique.
 

Alain Planès et Stéphane Degout © Fondation Royaumont

Liens affectifs

Les enregistrements sur piano historique réussissent décidément à la musique de Gabriel Fauré ! Nous nous sommes fait l’écho il y peu du fabuleux récital d’Aline Piboule sur un Gaveau de 1929 (1). Cette fois, c’est d’un Pleyel de 1892 qu’il faut louer les qualités dans le rôle d’accompagnateur d’un chanteur, Stéphane Degout (photo), que l’on découvre au côté d’Alain Planès. Sorti au printemps dernier chez Harmonia Mundi, ce disque avait été enregistré en mai 2023 à Royaumont ; choix compréhensible pour qui sait les liens anciens – et affectifs peut-on ajouter – du baryton avec une institution où il a autrefois étudié auprès de Ruben Lifschitz – personnalité absolument indissociable de l’histoire musicale de la Fondation.
 

 

Un panorama idéal de l'art fauréen

De Poème d’un jour op. 21(1878) à l’ultime Horizon chimérique (1921), en passant par La Bonne Chanson, Le Jardin clos et les Mirages, le programme offre un panorama idéal du Fauré mélodiste – et n’oublie pas pour autant le compositeur pour piano, entrecoupé qu’il est d’une très belle Ballade op. 19. Avec une justesse de ton exemplaire et un sens des caractères confondant (écoutez seulement les instantanés poétiques du Jardin clos ), les interprètes nous ouvrent les portent du jardin secret dessiné par une musique qui « décourage les lourdauds, les sourds et les touristes, mais [...] parle tout bas à l’oreille de ceux qui méritent d’entendre », comme le soulignait si bien Vladimir Jankélévitch.

Le 15 septembre, Stéphane Degout et Alain Planès seront de retour sur le lieu de leur enregistrement pour un récital (sur un Steinway moderne cette fois) comprenant évidemment beaucoup de Fauré. Le Français y sera mis en regard de deux auteurs allemands : Brahms et Schumann (le Liederkreis op. 24). Une excellente manière de commencer (à 11h30) un dimanche au cours duquel on retrouvera un peu plus tard (15h30) l’Orchestre des Champs-Elysées et Philippe Herreweghe dans la 8e Symphonie de Bruckner.

 

Les lauréats de l'Académie Orsay-Royaumont © Fondation Royaumont
 

De jeunes duos à découvrir

De mélodie et de lied, il sera à nouveau question le 28 septembre avec la « Nuit de la mélodie et du lied », confiée au lauréats de l’Académie Orsay-Royaumont. Lancée en 2019, cette dernière témoigne de l’importance que François Naulot – en charge depuis 2017 du programme Voix et Unité scénique de Royaumont (transformé en 2020 en pôle Voix et Répertoire), présentement directeur adjoint, et directeur général de la Fondation à compter du 1er janvier prochain – accorde à ce répertoire et à la transmission entre aînés et jeunes interprètes. Des enregistrements live parus chez B. Records ont documentés, promotion après promotion, les qualités des divers duos passés par l’Académie et une nouvelle livraison (la promotion 2023-2024) est attendue chez le même éditeur en février prochain.
 

"Voyage à Paris", dernière parution en date de la collection Orsay-Royaumont chez B. Records

Pour l’heure, quatre duos voix/piano – Lida Antola (sop)/Anni Laukkanen ; Emma Roberts(mezz.)/Emma Cayeux ; Joël Terrin (ténor)/Cole Knutson (baryt-b.)/Gyeongtaek Lee – attendent les auditeurs dans des programmes mêlant noms célèbres (Debussy, Duparc, Wolf, Sibelius, Ravel, Strauss, Hahn etc.) et auteurs plus rares (Korngold, Gurney, Moore, Weill, Yun).

Alain Cochard