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Mikko Franck dirige le Requiem de Berlioz à la Philharmonie de Paris– Accompli – Compte-rendu
Dans la grande salle de la Philharmonie de Paris, l’Orchestre philharmonique de Radio France au grand complet, sous la direction de son directeur musical Mikko Franck (photo), en compagnie du Chœur de Radio France et du WDR Rundfunkchor (Chœur de la Radio de Cologne, qui célèbre ses 70 ans tout comme le celui de Radio France), offrent un Requiem de Berlioz dont les effectifs s’apparentent à ceux prescrits par le compositeur. À savoir : 140 instrumentistes et 200 choristes, en sus d’un ténor soliste. Ce qui signale déjà l’ambition de ce concert, que l’interprétation ne fera que confirmer.
On est ainsi frappé immédiatement de la battue et de l’attitude de Mikko Franck, sans regard sur la partition dont il tourne négligemment les pages, se levant pour galvaniser la foule des forces rassemblées, se rasseyant pour sculpter les détails des nombreux passages délicats. Ce qui prouverait une connaissance approfondie de l’œuvre, que l’on n’attendait pas a priori de la part de ce chef qui ne s’était pas jusqu’à présent distingué dans le répertoire de Berlioz. À croire qu’entre Berlioz et Sibelius les affinités sont grandes ! Ce que, pour notre part, nous serions tenté de penser (notamment dans la manière d’écrire directement pour l’orchestre, sans le recours à un premier état au piano, cas quasi uniques parmi les compositeurs).
John Irvin (ténor) © Todd Rosenberg / Devon Cass
Car la suite ne fera que fortifier cette première impression, avec une attention vigilante aux nuances, entre fortissimo et pianissimo, aux répartitions instrumentales et chorales dans des tempos assez fidèles aux indications métronomiques de la partition, avec cette méticulosité que l’œuvre réclame. Le Philarmonique de Radio France répond scrupuleusement à ces sollicitations, entre emportements rigoureusement attaqués et pupitres à découvert soigneusement distillés. Les chœurs rassemblés se mêlent dans de mêmes parcours, de la ferveur éclatante à des subtilités (malgré des voix masculines d’une certaine raideur). Puisque l’œuvre fait alterner discrétion et fracas, intimisme et grandeur : « une méditation intime sur le néant mise en perspective avec des moyens gigantesques » (Christophe Deshoulières).
On notera cependant la dispersion dans les parties supérieures de la salle des quatre petites fanfares de cuivres du Tuba Mirum, ce qui provoque quelques décalages. Et ce qui, contrairement aux habitudes interprétatives, ne correspond pas aux indications d’une partition qui prévoit : « quatre petits orchestres d’instruments de cuivre placés isolément, aux quatre angles de la masse chorale et instrumentale ». De même, on ne sait trop pourquoi, les trombones qui répondent aux flûtes dans l’Hostias (dans l’extrême grave des premiers et l’extrême aigu des seconds – inimaginable dans l’ambitus du piano), se retrouvent pareillement exilés en partie haute. Pour sa part, John Irvin, ténor remplaçant Michael Spyres initialement prévu, s’acquitte valeureusement de sa participation dans le Sanctus, depuis un côté de plateau propice à la projection de la voix, avec une émission claire, quand bien même on aurait préféré une caractérisation plus diaphane (pour des aigus un peu tirés). Devant une salle comble lourde de concentration, libérée de toux entre les mouvements où Franck attend le rétablissement du complet silence pour lever sa baguette, c’est ainsi que l’œuvre s’écoule dans une tension fermement maintenue.
Pierre-René Serna
Berlioz : Requiem – Philharmonie de Paris, Salle Pierre-Boulez, 27 avril 2018
© Christophe Abramowitz
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