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« Motets en espace » à Notre-Dame - Eloge de la polychoralité
Année festive que 2013 pour la cathédrale de Paris, dont la construction fut entreprise par l'évêque Maurice de Sully, voici huit siècles et demi. Pour saluer l'événement, les responsables de «Musique sacrée à Notre-Dame» n'ont pas lésiné sur les moyens, ouvrant fastueusement la commémoration, le 18 décembre, avec les Vêpres à la Vierge de Monteverdi dont on peut dire que le style moderne fait avec elles une entrée triomphale au sanctuaire. Sur la base d'un concert par mois, la célébration semble d'ores et déjà promise au succès, la démarche liturgique s'accompagnant ici d'un projet de spatialité qui est au cœur de la musique.
Ainsi du concert « Motets en espace » du 15 Janvier qui, confié à la Maîtrise de Notre-Dame de Paris et à la Maîtrise de Radio-France, s'immergera dans la polychoralité, cette arme majeure du contrepoint qui fit la réputation de la Chapelle marcienne à Venise, suite aux initiatives de l'ingénieux Flamand Adrian Willaert qui y vulgarisa la technique du double chœur.
La programmation ratisse large, mêlant des pièces du XXe siècle ou contemporaines, signées notamment par le Suisse Frank Martin et les Suédois Hillborg et Sandström, à des auteurs-clés de la Renaissance, tels le Français Antoine Brumel qui fut maître des Enfants (c'est-à-dire des petits chanteurs) à Genève et Paris, avant de travailler, vers la fin de sa vie, à Ferrare, et surtout l'Anglais Thomas Tallis qui fut successivement au service d'Edouard VI, Marie Tudor et Elisabeth 1ère et resta jusqu'à sa mort secrètement fidèle à la foi catholique. En tout cas, on lui doit la page-phare de la soirée: le très spectaculaire motet Spem in Alium à 40 voix. Un sommet de ferveur collective qui fait de son auteur l'un des tout premiers maîtres spirituels de son siècle (on notera cependant qu'un tel déploiement de moyens est rare chez un musicien plutôt tourné vers la dévotion intérieure).
Composé en 1573, vraisemblablement pour les quarante ans de la Reine-Vierge, la pièce est structurée en 8 choeurs à 5 voix. Un tour de force, en termes d'écriture, où la lecture des maîtrises associées de Notre-Dame de Paris et Radio-France devrait être parfaitement en phase avec les motivations spatiales de l'œuvre (les interprètes y seront disposés en demi-cercle autour du public). Bref, une rencontre à ne pas manquer avec l'un des musiciens-symboles de la Renaissance insulaire - et son disciple William Byrd ne s'y est pas trompé, qui pleura sa mort en un adieu célèbre:«Tallis is dead and music dies...».
Roger Tellart
Maîtrise Notre-Dame de Paris, dir. Lionel Sow
Maîtrise de Radio France, dir. Sofi Jeannin
Œuvres de Tallis, Martin, Whitacre, Hillgorg, Sandström, Smith, Brumel
15 janvier 2013 – 20h30
Paris – Notre-Dame
www.musique-sacree-notredamedeparis.fr
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Photo : DR
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