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Nancy - Compte- rendu d’opéra : Wozzeck - Une exemplaire lisibilité
Dans de superbes décors de Jean-Marc Stehlé, la lecture redoutable de réalisme et de précision de Michel Deutsch se révèle d’une exemplaire lisibilité et clôt en beauté la saison de l’Opéra National de Lorraine. Wozzeck est transposé à l’époque où Berg écrivit son opéra et, dans ce contexte de la société industrielle, jamais les surtitres n’auront paru aussi inutiles tant le jeu des acteurs ainsi que le dispositif scénique épousent d’une façon idéale les quinze scènes choisies par Berg dans l’œuvre de Büchner.
La représentation se déroule sans entracte, avec seulement un tombé de rideau à la fin de chaque acte : les interludes prennent toute leur importance dans cette conception où la descente de Wozzeck dans la schizophrénie s’impose avec évidence.
La direction de Sebastian Lang Lessing tire l’œuvre du côté de Brahms. Beauté des cordes, justesse des cuivres : son approche ne se départit jamais d’une grande tension, à son acmé lors du fulgurant accord de si dans l’interlude qui suit le meurtre de Marie.
Tomas Tomasson campe un Wozzeck humain entièrement sous la coupe de ses deux âmes damnées que sont le Capitaine et le Docteur. Ce sont eux qui, par leur sadisme, dans la deuxième scène de l’acte deux, pousseront Wozzeck sur le chemin de la déchéance et du crime. Superbe Capitaine du ténor Wolfgang Ablinger-Sperrhacke qui, avec des aigus tranchants comme l’acier, donne à son personnage tout le sadisme et le machiavélisme requis. Andrew Greenam, dans le rôle du docteur, avec des graves superbes et un timbre où perce un semblant de folie, campe un personnage dans la ligné du Docteur Mabuse.
Marjorie Elinor Dix, possède un soprano incisif, une voix égale sur toute l’étendue de la tessiture et donne de Marie un portrait fouillé jusque dans les moindres détails. Sa déchéance et ses doutes, après avoir succombé aux avances du Tambour–Major, sont d’une poignante vérité.
Tambour–Major plein de morgue et de sadisme du ténor Louis Gentille.
Remarquable Andrès de John Bellemer qui affronte l’éprouvante tessiture du rôle avec un prodigieux aplomb.
Les chœurs dirigés de par Franck Markowitsch, venu secondé Merion Powell empêchée par un problème familial, ont donné une prestation d’une homogénéité exemplaire et d’une vaillance que l’on n’avait pas entendues depuis longtemps sur cette scène.
Un Wozzeck pour l’éternité.
Bernard Niedda
Opéra National de Lorraine, 22 juin 2006.
Photo : DR
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