Oui, le bayou d’Ulrica est subtilement atmosphérisé, avec des lumières de vaudou et une ambiance de fausse vaticination que Deflo trahit en invitant un faux mort vivant : tout est théâtre dit-il sagement. Mais ailleurs on est transporté au Sénat, et dans une vague guerre de sécession que la refonte américaine d’un sujet d’origine suédoise autorise certes. Rien jamais ne vient transcender un spectacle honnête et terne, et après les fulgurances d’un Warlikowski cette même saison la chute en qualité est terriblement abrupte. D’autant que vocalement ont frôle la débâcle. Pour un Oscar d’anthologie, vif et profond à la voix, vocalisant sur des ailes d’ange (Camilla Tilling), pour un Renato très tenu et suprêmement chanté jusque dans son mordant - Tézier, attendu et justement fêté -, on doit faire avec l’italien en voyelles de deux dames chantant en arrière toute, justes par hasard – et pas longtemps.

Certes des grands formats, qui emplissent Bastille, mais en froissent l’atmosphère par leur vibrato ullulando. Et on ne dit rien du style Verdi, passé à la moulinette d’un vérisme générique qui lui est étranger, pire, pour Le bal masqué à la limite du criminel. Evidemment, Marcelo Alvarez n’est pas venu, rien ne l’indiquait dans les feuillets remis au spectateur, seules de discrètes affichettes signalaient son remplaçant, Evan Bowers. Voix probe, stylée, mais décidément pas assez spinto pour Riccardo. Direction karajanisée, très subtile et lyrique de Semyon Bychkov, mais on se souvient de l’électricité, de la petite musique sur les nerfs que sait susciter ici Muti et avant lui que déchaînait Mitropoulos. Tout le contraire du subtil décor d’orchestre entendu durant cette matinée.

Jean-Charles Hoffelé

Giuseppe Verdi : Un ballo in maschera, Opéra Bastille, le 10 juin, puis les 13, 19, 22, 25, 28 juin et les 4, 7, 10 et 13 juillet 2007

Programme détaillé de l’Opéra Bastille

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Photo : C. Leiber/Opéra de Paris