Les événements importants ne sont jamais là où les snobs croient qu’ils sont. Pour se remettre du gâteau d’anniversaire de l’Orchestre de Paris particulièrement indigeste (Pleyel, 20/XII), il fallait aller à Radio France pour la célébration du discret quart de siècle de notre formation école, l’Orchestre Français des Jeunes, sous la baguette d’un vrai maître ès musique, Jean-Claude Casadesus. C’est, en effet, à Paris que s’est achevée la session d’hiver des cadets qui se sont ainsi produits avant à Aix-en Provence, Dijon et Vichy. Ce serait peu dire : 25 ans et pas une ride. C’est surtout un grand cru que cette cuvée 2007 qui illustre à merveille notre dernière chronique.

Le programme était pourtant ambitieux, constituant un test en vraie grandeur et une initiation comme trop peu de nos jeunes ont l’occasion d’en connaître avant leur entrée dans la vie professionnelle. L’Ouverture de fête d’un Chostakovitch accumulant à plaisir tous les trucs et les poncifs du genre de façon à la fois débridée et finalement très pédagogique. Le 2ème Concerto de Saint-Saëns est l’occasion d’apprendre à écouter l’autre, en l’occurrence le pianiste Bertrand Chamayou (photo) qui ne joue pas les chochottes, mais accepte de bon cœur les échanges de la musique de chambre quand il n’est pas seul sur la sellette.

La seconde partie du menu plonge nos Eliacins dans le grand bain avec des extraits du Roméo et Juliette de Prokofiev où il faut payer comptant que vous soyez altos, violons, flûtes, hautbois ou les cinq cors ! Casadesus donne sa mesure dans ce bel exemple de dressage de haute école. Mais il va plus loin dans les arcanes de la musique avec une 2e Suite de Daphnis et Chloé de Ravel où les jeunes nous tirent des larmes tant ils vont chercher la musique au plus profond d’eux-mêmes. Oui, décidément, la musique ne manque pas de bras et de souffle chez nous. Dommage seulement que l’establishment fût si peu nombreux à venir constater que la relève est assurée.

Jacques Doucelin

Radio France, 23 décembre 2007

Photo : DR