En associant le fameux Requiem de Mozart à la rare Messe en ré majeur d’Antonio Salieri, Pierre Cao manifeste sa volonté de réhabiliter un auteur victime de la calomnie. Le début d’une série de concerts du Chœur Arsys-Bourgogne dirigé par son fondateur.

Mozart et Salieri : ce programme est aussi le titre d’une nouvelle de Pouchkine (écrite dans les années 1820), qui inspira par la suite Rimski-Korsakov pour un opéra éponyme (une partition au demeurant magnifique datée de 1897). Salieri empoisonneur du génial auteur de Don Giovanni… Calomniez, calomniez, il est restera toujours quelque chose… Le film « Amadeus » ayant repassé une généreuse couche sur le sujet il y a quelques années, Salieri est aujourd’hui totalement déconsidéré dans biens des esprits.

Venu au monde l’année de la mort de Bach, disparu alors que Beethoven travaillait à ses derniers quatuors, Salieri est la fois un extraordinaire témoin d’une période cruciale dans l’évolution de l’esthétique musicale et un auteur extrêmement prolifique et séduisant. D’ailleurs, croyez que Beethoven, Schubert, Liszt, Meyerbeer se seraient ennuyés à travailler avec ce maître s’il avait été aussi médiocre que d’aucuns veulent le faire croire… ? Les honneurs furent pour Salieri, la misère pour Mozart, certes, mais l’injuste déséquilibre de la situation ne doit pas conduire à ignorer la production de celui qui devint Maître de Chapelle impérial à Vienne en 1788.

Grâce à un enregistrement de Christophe Rousset (3 CD Ambroisie) on a récemment découvert avec bonheur l’opéra La Grotta di Trofonio. Grâce à Pierre Cao, le moment est venu d’entendre l’une des sept messes de Salieri recensées par le dictionnaire Grove’s : la Messe en ré majeur, ouvrage daté de 1788. Une découverte d’autant plus intéressante que l’on n’évoque en général que la Messe en si bémol majeur (1809).

Pierre Cao est parvenu à se procurer la partition de la Messe en ré majeur chez un éditeur américain et s’est laissé séduire par « une écriture respectueuse du texte latin, par un Gloria très festif avec quatre trompettes et timbales », par le caractère concertant aussi d’un ouvrage qui comporte de très beau solos instrumentaux.

Le 10 février à la salle Gaveau, la Messe en ré majeur jouxtera le célèbre Requiem de Mozart : « un mariage intéressant pour changer l’image de Salieri », note Pierre Cao. Avec les voix de Gerlinde Sämann, Britta Schwarz, Hans-Jörg Mammel et Cornelius Hauptmann, le Chœur Arsys-Bourgogne et le Concerto Köln, Pierre Cao débute une série d’une douzaine de concerts (Stradivaria remplacera le Concerto Köln pour les derniers). Que vous soyez à Paris ou en province, les occasions ne manqueront donc pas pour que vous goûtiez à une originale initiative de l’année Mozart.

Alain Cochard

Vendredi 10 Février / 20 h 30. Salle Gaveau

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Photo : DR