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« Quand le diable frappe à la porte » (Offenbach/Schoenberg) (Streaming) – Une simplicité accomplie – Compte-rendu
Les noms des chanteurs présents en octobre au Festival ne changeant aucunement, on ne se faisait guère d’inquiétude sur le plan vocal – avec raison ! L’attente allait plutôt du côté de la mise en scène, celle d’Alma Terrasse, jeune artiste au parcours déjà riche dans le domaine théâtral qui signe ici son tout premier spectacle lyrique. D’évidence son nom ne devrait pas tarder à se répandre auprès des directeurs d’opéra à l’affût de talents nouveaux. Avec ce diptyque Offenbach/Schoenberg – deux partitions moins éloignées qu’il n'y paraît car elles content l’une comme l’autre une histoire de couple – elle parvient un à résultat pleinement accompli. De l’atmosphère pyrénéenne et rustique du Offenbach à celle d'une chambre conjugale dans la Vienne de Freud, son travail, très finement réglé, séduit par la simplicité des moyens – Elsa Ejchenrand à la scénographie, Elisabeth de Sauverzac aux costumes et Anne Poitevin aux lumières méritent bien des éloges – et la capacité à toujours agir en plein accord avec le mouvement de la musique.
Pas un temps mort au cours d’un spectacle qui bénéficie de l’énergie d’une équipe parfaitement soudée. Avec l’étonnant renversement induit par le passage du Offenbach au Schoenberg, Mélanie Boisvert (Jeanne/la femme) et Antoine Philippot (Gaspard/le mari) demeurent toujours aussi remarquables de justesse psychologique, et d’aplomb face aux chausse-trapes rythmiques du Schoenberg. On n’est pas moins conquis par le talent d’Odile Heimburger, les talents plutôt car elle ajoute à la fraîcheur vocale une maîtrise de l’archet qui lui permet d’entrer avec beaucoup de liberté le rôle de Georges le violoneux chez Offenbach. Benoît Rameau est aussi parfait sur le mode « bon gars » dans le Jacques des Trois baisers qu'en ténor dragueur chez Schoenberg. Délicieux enfant de Marie Roth.
Quant à Takénori Némoto, qui a signé avec l'art qu'on lui sait en ce domaine la réduction des parties orchestrales, il dirige les musiciens de l’Ensemble Musica Nigella avec précision, sens des timbres et attention incessante au plateau. Ces qualités ajoutent beaucoup à la cohérence et à la réussite d’un spectacle dont la dimension chambriste n’est pas le moindre des charmes.
Vivement que ce « Diable » puisse tourner dans des salles pleines et se faire applaudir comme il le mérite !
Alain Cochard
« Quand le diable frappe à la porte » - Offenbach : Les Trois baisers du diable & Schoenberg : Von Heute auf Morgen – Paris, Athénée Théâtre Louis-Jouvet. Capté les 11 et 12 mars 2021 ; diffusion sur le site de l’Athénée du 5 au 11 avril 2021 // www.athenee-theatre.com/
Photo © Elisabeth de Sauverzac
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