Journal
The Rake’s progress au Palais Garnier – Life is a cabaret ? – Compte-rendu
Il y a douze ans, nous avions apprécié la lecture du Rake’s progress tout en strass et paillettes d’Olivier Py. La seconde reprise de ce spectacle (créé en 2008) conçu comme une revue de cabaret où se côtoient dans un même élan sulfureux, show girls aux seins nus, jongleurs, nain, femme à barbe, catcheurs et danseurs prenant des poses orgiaques plus que suggestives arrive sans doute trop tard. Si Olivier Py ne s’était pas répété jusqu’à la parodie, nous aurions certainement goûté à nouveau à ce déchaînement visuel (un peu vain tout de même !) ouvertement queer, censé accompagner cette fable et la dynamiter.
© Gerguana Damianova - OnP
Or le boulimique metteur en scène et son décorateur attitré, Pierre-André Weitz, n’ont jamais cessé de recycler au théâtre comme à l’opéra, ce même univers décadent de Tannhaüser à Manon, en passant par Les contes d’Hoffmann, Lulu, jusqu’à de récentes Mamelles de Tirésias – sans oublier Le soulier de satin ou Le vase de parfum – jusqu’à saturation. Marqué par le music-hall, Py a choisi par habitude et par facilité d’appliquer à de trop nombreuses productions les mêmes recettes (escaliers vertigineux, néons, travestissements, nudité, plumes, praticables et tréteaux déplacés à vue…) sans mesurer le risque de lassitude. Cela ne remet pas en cause les grandes réussites de ce créateur impénitent capable de réaliser d’inoubliables Huguenots, de bouleversants Dialogues des Carmélites ou de marquer les esprits avec un ténébreux Hamlet de Thomas.
Remonté sans entrain par Joséphine Kirch, ce Rake’s progress manque de rythme, de nerf, d’énergie, les tableaux s’enchaînent sans la fluidité escomptée, le climat interlope de quelques scènes provocantes ne parvenant pas à maintenir l’attention d’un public dont une partie n’a pas hésité à quitter le théâtre à l’entracte.
© Gerguana Damianova - OnP
Comble de malchance, la direction trop unilatéralement sèche et raide, malgré sa puissante tenue, de Susanna Mälkki ne favorise pas toujours l’écoute de cette œuvre déconcertante. Le ténor Ben Bliss, entendu en 2023 en Don Ottavio (Don Giovanni), trouve en Tom Rakewell un personnage de victime idéale, fragile et influençable, dans lequel il irradie vocalement et scéniquement, à l’image de sa partenaire Golda Schultz qui chante Anne Trulove avec un charme, un naturel et une aisance déconcertante. Iain Paterson, qui succède à Laurent Naouri et à Guidon Sacks, n’a pas l’étoffe du diable Nick Shadow, qu’il interprète d’une voix monocorde et de manière désabusée sans parvenir à s’imposer durablement.
Clive Bayley (Trulove), Justina Gringyté (Mother Goose) et Rupert Charlesworth (Sellem) se tirent parfaitement de leurs rôles respectifs, ainsi que Jamie Barton dans celui de l’effrayante et magnanime Baba the Turk, escortés par les éminents membres du chœur de l’Opéra.
François Lesueur
> Les prochains concerts "Stravinski" <
Stravinsky : The Rake’s progress – Paris, Palais Garnier, 30 novembre 2024 ; prochaines représentations les 4, 8, 10, 12, 17 & 23 décembre 2024 // https://www.operadeparis.fr/saison-24-25/opera/the-rakes-progress#artists
Photo © Gerguana Damianova - Opéra national de Paris
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