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Roger Norrington dirige l’Orchestre philharmonique de Radio France au Festival Berlioz - Norrington l’intercesseur - Compte-rendu
Roger Norrington est de ces chefs qui savent transgresser un programme de concert a priori convenu. À savoir, en l’occurrence, Les Nuits d’été associées à la Symphonie fantastique dans le cadre du Festival Berlioz. Mais l’effet est venu, dépassant la routine pour livrer un Berlioz neuf comme au premier jour, hors de toutes habitudes.
Christine Rice & Roger Norrington © Festival Berlioz
La mezzo Christine Rice ne constitue assurément pas une grande pointure vocale, confrontée aux plus fameuses divas qui sont emparées du cycle mélodique de Berlioz, mais elle sait conjuguer expressivité et ligne de chant bien menée. Et déjà l’Orchestre Philharmonique de Radio France, en petite formation, distille des couleurs diaphanes ou voluptueuses dans une parfaite cohésion avec la soliste.
Vient alors la Fantastique, cette fois par une phalange de quatre-vingt-quatorze instrumentistes d’un Philharmonique soulevé et emporté comme jamais. À noter que la partition choisie correspond au dernier état de la symphonie, comportant les deux reprises, dans le premier et le dernier mouvement, sans la partie de cornet dans « Un Bal » (ajoutée tardivement, mais non reprise par le compositeur dans sa publication). De sa battue toujours élégante, Norrington se fie aux innombrables indications de tempos et de nuances précisément notées, sans débordement intempestif mais avec l’impétuosité quand il faut. Pour sa première apparition au festival, ce chef coutumier des formations sur instruments d’époque impose aux constituants de cet orchestre conventionnel un son net, sans vibrato, des attaques et coups d’archets d’une manière quasi baroqueuse. Le Philharmonique s’en retrouve transfiguré, pour une restitution entièrement renouvelée d’une œuvre qu’il a pourtant à son répertoire régulier. « Un maximum de délicatesse couplé avec un maximum de virilité », selon le mot de Thomas Beecham. Flamme et clarté, virtuosité et expression, raffinement et emportement, « une précision extrême unie à une verve irrésistible » : les vertus réclamées par Berlioz, éprouvées par un métier inlassable de chef d’orchestre, surgissent telles qu’il les aurait lui-même transmises – veut-on croire.
Norrington ou l’incarnation de son modèle, l’intercesseur de l’œuvre de Berlioz, jusque dans l’humour : quand il s’adresse à un public qui ne peut réfréner son enthousiasme en applaudissant à tout rompre entre les mouvements. Et un concert à marquer d’une pierre blanche parmi le florilège déjà imposant, depuis sa prise en main par Bruno Messina, du Festival Berlioz de La Côte-Saint-André. On regrette alors d’autant que la technique de Radio France n’ait prévu aucune captation de ce moment d’intense exception, qui n’est hélas pas par ailleurs appelé à être repris (ni même à l’auditorium parisien de Radio France) et seulement à demeurer gravé dans une mémoire subjuguée.
Pierre-René Serna
Festival Berlioz, La Côte-Saint-André, 2 septembre 2017.
Photo Roger Norrington © Festival Berlioz
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