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Sceaux - Compte-rendu - Une Infedelta futée
Burletta per musica : tout est dit. Ce n’est pas à une méditation métaphysique que Joseph Haydn conviait ses auditeurs avec L’Infedelta delusa (L’Infidélité déjouée) créée à Esterhaza en 1773, mais à un souriant divertissement conçu à partir d’un livret de Marco Coltellini. Le Festival d’Aix-en-Provence a eu la bonne idée de monter cet ouvrage l’an dernier dans la cadre de son Académie européenne de musique, en coproduction avec différentes maisons et manifestations (Sceaux, Toulon, Luxembourg, Lille, Brème), et la Scène nationale Les Gémeaux vient de l’accueillir à l’orée de l’année Haydn.
Intrigue un peu courte que celle de l’Infedelta (une banale histoire de mariage arrangé), surtout dans un Acte 1 que des décors métalliques et anguleux, froidement éclairés et bien éloignés de toute douceur campagnarde, plombent de surcroît. Dommage car la baguette de Jérémie Rohrer à la tête du Cercle de l’Harmonie fait pétiller la musique avec chic et énergie, tout autant qu’une excellente équipe de cinq chanteurs où l’on retrouve trois des protagonistes de la distribution aixoise : Claire Dedono, impayable Vespina, Ina Kringelborn, Sandrina pleine de fraîcheur, et Yves Saelens qui cultive sans en rajouter la rusticité du personnage de Filippo, père de Sandrina. Nouveaux venus, le ténor Julian Prégardien – le fils de Christoph, vous avez gagné ! – campe le rôle de Nencio avec la suffisance requise, tandis que le baryton Thomas Tatzi incarne un fringant et touchant Nanni, l’élu du cœur de Sandrina.
Si l’oreille trouve plus son compte que l’œil jusqu’à la fin du I, au moment de l’ouverture du grenier à grains, tout change ensuite, tout prend vie ! Fantaisie, situations comiques appuyées sur le déguisement : le metteur en scène Richard Brunel a su tirer parti d’un matériau bien plus riche il est vrai que dans ce qui précédait. On rit souvent au cours de l’Acte II, et d’abord en son début lorsque Vespina, déguisée en vieille, offre un mémorable « Ho un tumore in un ginocchio » - révélation pour beaucoup d’auditeurs que la jeune la soprano maltaise Claire Dedono ! Oubliée l’impression de départ lorsque s’achève le spectacle ; seules demeurent les couleurs et la bondissante drôlerie d’une mise en scène sans prétention mais au bout du compte efficace et futée. Si L’infedelta venait à passer près de chez vous dans les semaines et les mois qui viennent, ne la manquez pas.
Alain Cochard
Joseph Haydn : L’Infedelta delusa. Sceaux, Les Gémeaux, Mercredi 14 janvier 2009
Prochaines représentations : 30 janvier à Besançon, 6et 8 février à Bilbao, 12, 14 et 15 février à Valladolid, 13 et 15 mars à Toulon, 2 et 4 septembre à Brème.
Photo : DR
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