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A Sign of love par le Ballet de Shanghai – Esprit de finesse - Compte-rendu
Un vrai délice à savourer en délicatesse que ce A Sign of love, directement inspiré du film culte de Wong Kar-Wai, In the Mood for Love, et présenté par le Ballet de Shanghai, huit ans après sa création en Chine. Et la découverte d’une compagnie non seulement parfaite techniquement, mais inspirée, habitée, et bien plus accrocheuse que les habituels spectacles académiques que proposent les danseurs classiques chinois, exagérément respectueux de codes dont ils n’ont les clefs ni psychologiques ni historiques.
La directrice de la compagnie, créée en 1979, l’élégante ballerine Lili Xin, a su brillamment passer l’examen de la mixité, en gardant une tonalité chinoise moderne, puisqu’elle se réfère au cinéma, tout en nous transportant dans un passé récent, juste avant le conflit sino-japonais. Et en confiant la chorégraphie à un ancien de Béjart, Bertrand d’At, qui fut aussi directeur du Ballet du Rhin. Dans les décors de Jérôme Kaplan, sobres et efficaces - on se doute bien que les moyens du Palais des Sports ne permettent pas des effets trop sophistiqués - se mêlent donc les danses insouciantes, la gaieté forcée d’un ancien monde à l’agonie, sur les rythmes déchaînés du nouveau, à la veille de la bataille de Shanghai et du massacre de Nankin.
Bertrand d’At a construit sur cette trame brutale un superbe ballet néoclassique, où se détachent en une délicate broderie presque incongrue, digne des légendes les plus raffinées, les élans douloureux d’un couple qui se cherche avec pudeur : l’éternité de l’amour, sur la toile de fond des bouleversements de l’histoire.
La chorégraphie, aussi évanescente qu’il est nécessaire pour évoquer ces mouvements de l’âme et du désir, est toute de sinuosité, de frôlements, tandis que la troupe chargée de créer l’ambiance années 30, se déchaîne avec une éclatante vigueur. Le contraste des deux styles autant que celui des costumes, permet d’admirer les lignes fines et fluides, le placé impeccable, et les muscles tout en longueur de ces danseurs parés pour toutes les formes de ballet. Et Beethoven y trouve son chemin, entre jazz shanghaien, boogie-woogie, et quelques bouffées de musique traditionnelle.
La troupe a aussi l’occasion de faire valoir sa virtuosité dans une pièce elle beaucoup plus célèbre, La Fille aux Cheveux blancs, histoire emblématique de la Révolution culturelle, portée par l’héroïsme et le militarisme triomphant, comme un contrepoint au ballet précédent, puisque le Chine y brave victorieusement le joug japonais ! L’œuvre, immensément populaire en Chine depuis sa création en 1965 par ce qui devait devenir le Ballet de Shanghai en 1979, en est devenue la carte de visite. A déguster avec des baguettes.
Jacqueline Thuilleux
A Sign of love par le Ballet de Shanghai - Paris, Palais des Sports, 14 mars 2014. Autres représentations de A Sign of Love, le 15, 20 mars, de La Fille aux cheveux blancs, les 18 et 19 mars 2014.
http://balletdeshanghai.valprod.fr
Photo © Lunxun Chen
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