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Sous le signe de Widmann

Troisième et dernière de la résidence du Quatuor Psophos au théâtre de l’Athénée, la saison 2008-2009 de l’ensemble s’ouvrait dans une configuration un peu modifiée – l’approche d’un heureux événement a en effet amené la violoniste Bleuenn Le Maître à céder provisoirement la place à sa talentueuse collègue Caroline Vernay.

Dédié à Jörg Widmann(1), le concert de rentrée des Psophos aura permis de découvrir le jeune artiste allemand (né en 1973) sous son double visage de compositeur et de clarinettiste. Quatrième volet d’une vaste œuvre pour quatuor à cordes en cinq parties, son Quatuor n°4 ouvre le programme dans une atmosphère singulière. Né dans le presque imperceptible frottement des archets sur le bord de la table des instruments, le morceau, noté Andante, se déploie pareil à une procession nocturne – parfaitement à sa place dans le décor (un coin de cimetière) de Rêve d’automne, la pièce de Jon Fosse qui se joue jusqu’au 18 octobre à l’Athénée ! –, ponctué d’effets étranges, bruitistes pourrait-on dire, où des spectres semblent faire irruption. Avec un formidable sens du détail et de la nuance, les Psophos rendent justice à une belle composition qui témoigne d’un sens aigu du fantastique, bien digne d’un créateur né outre-Rhin.

Nuance : le mot vaut aussi pour le Quatuor de Ravel donné ensuite. Amplement respirée, l’interprétation des quatre jeunes instrumentistes privilégie le travail de la demi-teinte (Le Très lent est d’une poésie merveilleuse) et se garde d’angles trop vifs, sans pour autant altérer le dynamisme du discours. Sous leurs archets, le Quatuor en fa majeur est bien l’œuvre d’un jeune génie en devenir.

Associé à la clarinette de Jörg Widmann, le Quatuor Psophos termine avec le Quintette KV 581 de Mozart. La sonorité de Widmann ne possède pas le velours et la richesse de celle d’un Florent Héau ou d’un Nicolas Baldeyrou, mais quelle leçon de musique de chambre l’artiste nous offre-t-il ! On sent le compositeur ici, attentif à s’intégrer continûment à un tout et ne tirant jamais la couverture à lui. Dans cette œuvre tardive, et de ce fait parfois surchargée d’intentions, que l’on apprécie la simplicité, le naturel (Larghetto), la tendresse un brin naïve (Menuet), en un mot la fraîcheur du propos !

La saison du Quatuor Psophos à l’Athénée commence. Notez dès à présent les dates des 29 novembre, 21 mars et 23 mai sur vos agendas.

Alain Cochard

Athénée Théâtre Louis Jouvet, le 11 octobre 2008

(1) Jörg Widmann figure par ailleurs au programme du Quatuor Artemis, ce vendredi 17 octobre au Théâtre des Champs-Elysées, avec son Quatuor n°2 « Choralquartett »

Photo : DR
 

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