Longue robe de velours noir, port de reine ; noblesse, race, distinction : voir Anja Harteros (photo) entrer en scène c’était déjà l’entendre chanter, se disait-on au terme de sa mémorable interprétation des Quatre derniers lieder de Strauss. Ces quatre morceaux ne sont les « derniers » de leur auteur que par le hasard de l’existence. Pardi !, Richard n’aurait pas demandé mieux que de pouvoir continuer à écrire encore un peu, si la camarde ne s’était avisée de faire un crochet par Garmisch ce 8 septembre 1949.

Harteros a l’intelligence de le comprendre et de ne pas infliger à ces pages la déliquescence « fin-du-mondesque » dont elles pâtissent souvent. Sans raffiner les timbres autant qu’on le souhaiterait, Tomas Netopil la suit dans une approche naturelle, éminemment sensible et émouvante, mais simple, dénuée de pathos. Tempos naturels, fluides ; la poésie straussienne rayonne sans une once d’affectation (au violon solo, Roland Daugareil se met à l’unisson de ce miracle de beauté). Triomphe mérité pour une voix magnifique certes, pour une artiste surtout.

Pour son premier concert avec l’Orchestre de Paris, le Tchèque Tomas Netopil – qui vient de diriger la récente reprise des Contes d’Hoffmann à la Bastille – a commencé la soirée par la rare rhapsodie Taras Bulba de Janacek dont il a su souligner l’âpreté avec un beau sens narratif.

En seconde partie, il joue à nouveau la carte tchèque avec l’inoxydable « Nouveau Monde » de qui vous savez. Public aux anges. Etions-nous mal luné ? Allante mais aux couleurs ternes - et entachée de pas mal de scories -, cette interprétation nous laisse en tout cas bien dubitatif. Il est vrai qu’après le magique Strauss d’Harteros, c’est – pourquoi le cacher ? - d’un bol d’air dans le calme de la nuit dont a eu envie.

Alain Cochard

Paris, Salle Pleyel, 4 octobre 2012

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Photo : Marco Borggreve/DR