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Tugan Sokhiev et l’Orchestre du Capitole à Pleyel - Risque et transfiguration - Compte-rendu

La longue, très longue ovation réservée par le public de Pleyel à Tugan Sokhiev, à ses troupes du Capitole de Toulouse, à l’Orfeon Donostiarra et à Anastasia Kalagina (sop.) et Janina Baechle (mezzo) est à la mesure du choc éprouvé à l’écoute de la 2ème Symphonie « Résurrection » de Mahler. Depuis l’arrivée de son jeune directeur musical, la phalange toulousaine s’aventure de plus en plus souvent dans des répertoires auxquels on n’était pas habitué à l’associer, ce qui ne veut pas dire qu’elle les a forcément ignorés durant une ère Plasson en rien réduite à la musique française comme d’aucuns s’acharnent parfois à l’imaginer. L’ancien directeur musical avait ainsi donné la « Résurrection » en 1997 (avec le Chœur de Bilbao) et par la suite, durant la période de transition qui précéda l’arrivée de Sokhiev, l’orchestre est revenu au monumental ouvrage de l’Autrichien dans le cadre d’un cycle Mahler confié à Joseph Svensen. Reste que l’on guettait avec une sacrée curiosité la « Résurrection » de Sokhiev : on n’aura pas été déçu !

Le jeune maestro s’empare du mouvement initial… Quel bras, quelle manière de « ferrer » d’emblée l’auditeur ! On s’embarque sans réserve dans une approche qui manifeste toute la gravité et la solennité requises mais ne s’autorise aucun pathos. Les quatre mouvements suivants étonnent plus encore par l’extrême retenue des tempi : pas un temps mort pourtant tout au long d’un ouvrage dont le chef éclaire les moindres détails et anime en permanence le tissu sonore. Rapidité du tempo et vie d’une interprétation sont choses bien distinctes… Par l’acuité de son propos et la précision de son geste, le chef détache la « Résurrection » du siècle romantique finissant et la projette dans le futur. Pareils tempi ne sont pas les plus confortables pour les solistes, mais Janina Baechle et Anastasia Kalagina se confrontent remarquablement à l’option choisie. Il en va de même pour l’Orfeon Donostiarra, grand habitué de l’ouvrage et partenaire de très longue date de l’Orchestre du Capitole. Entrée du chœur ? Mieux vaut parler d’une fabuleuse apparition pour laquelle la formation (conduite depuis 1988 par Jose Antonio Sainz Alfaro) témoigne d’une homogénéité à toute épreuve dans un surnaturel ppp. L’un des plus beaux chœurs du monde, tout simplement ! Avec un tel allié, Sokhiev parvient à chauffer à blanc l’imposant finale, sans qu’il ne verse jamais dans l’emphase et la boursouflure. Une interprétation aussi risquée qu’assumée dont la Symphonie n°2 ressort littéralement transfigurée.

Alain Cochard

Paris, Salle Pleyel, 18 mars 2012

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Photo : DR
 

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