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Une interview de Françoise Thinat, Présidente-Fondatrice du Concours International de piano d’Orléans
Une 9ème édition dédiée à la mémoire de Geneviève Joy ? Fondatrice et Présidente du Concours d’Orléans, Françoise Thinat n’a pas oublié en effet que l’éminente pianiste et pédagogue récemment décédée avait été en 1994 la présidente du jury du premier Concours. Depuis, Orléans s’est taillé une belle place parmi les compétitions de piano, grâce à la spécificité de son répertoire (XXe siècle et contemporain) et aux choix toujours pertinents de ses jurys.
La 9ème édition du Concours d’Orléans démarre le 22 février. Quel regard portez-vous sur son l’évolution de la compétition depuis sa naissance en 1994 ?
Françoise Thinat : Le premier concours était un peu sage et très copié sur les grands concours existants, ne serait-ce que du point de vue du mécanisme, du jury, etc., avec un parcours très balisé. Autour des années 2000 un basculement entre les œuvres d’avant-garde et celle du début du XXe siècle s’est opéré en faveur de ces dernières. Peut-être à cause du prix de composition(1), auquel je tiens beaucoup, on a vu par la suite apparaître des candidats plus créatifs et je suis maintenant obligée de me battre un peu à l’envers. Le Concours a effectué un parcours un zigzag qui l’a rendu plus audacieux, c’est certain. Je ne dis pas que je freine cette tendance, mais j’ai tenu cette année à repenser la première épreuve du concours. En vingt minutes, il s’agit de prouver que l’on est un très bon pianiste, que l’on a des idées et qu’enfin on est un excellent musicien, car l’on joue du Debussy.
Comment se présente le 9ème Concours (nombre, provenance des candidats, etc.) ?
F. T. : Nous avons reçu 65 candidatures effectives. Résultat auquel on parvient en fonction des lettres de recommandation, de l’intérêt des programmes choisis, de la juste compréhension du prix de composition (il ne suffit pas de jouer un compositeur vivant, ce doit vraiment être une création). Les profils des candidats sont très variés. A cause de la limite d’âge à 40 ans, nous avons parfois affaire à des gens qui viennent pour faire leur dernier concours, en tout cas pour donner ce qu’ils ont travaillé et amassé et qu’ils sont heureux de ressortir. Ils éprouvent un plaisir réel, assorti pour nous de grandes difficultés (inhérentes à des programmes trop gourmands, trop longs nécessitant des modifications, etc.). Au bout du compte, 42 personnes (19 nationalités représentées) seront sur les rangs le 22 février.
Un Prix spécial André Jolivet fait son apparition cette année…
F. T. : J’en suis très heureuse car c’est un compositeur que j’aime beaucoup. L’idée est venue d’une rencontre avec Christine Jolivet. L’intérêt d’un tel prix est de mettre en exergue un compositeur et de contribuer à le faire mieux connaître. Je me souviens que, lorsque nous avons créé le Prix Ohana en 1996, des candidats potentiels nous appelaient de l’étranger en demandant « qui est Ohana ? », ce qui n’arrive plus aujourd’hui. Onze personnes présenteront le Prix Jolivet, avec des œuvres très importantes : Mana, 2ème Sonate, Danses rituelles.
Nous aurons également un Prix spécial Chostakovitch lors de la Finale, en vue de laquelle les candidats ont été invités à choisir l’un des 24 Préludes et Fugues.
Une Finale à laquelle participent trois des six membres des Percussions de Strasbourg…
F. T. : Une œuvre pour piano et percussions a en effet été commandée à Philippe Hurel, qui s’est lancé dans l’entreprise avec énormément d’enthousiasme. Je puis déjà vous annoncer que l’ouvrage, intitulé «Interstices» et d’une durée de treize minutes, sera redonné avec notre Premier Prix en juin à New York, au Mannes College, et le 31 août lors du concert de clôture du Festival Encuentros en Argentine. Sacré challenge pour les Percussions de Strasbourg que leur participation au concours ! Elles acceptent en effet de jouer avec des gens qu’elles ne connaissent absolument pas et ne vont disposer que de peu de temps pour répéter une œuvre très difficile. Il s’agit d’un véritable petit concerto pour piano et percussions.
Puis-je en conclusion vous demander quelques mots sur Geneviève Joy, disparue il y a peu ?
F. T. : Geneviève Joy, qui a été mon premier professeur, avait accepté la présidence du premier Concours en 1994. C’était une femme avec une énorme personnalité, que j’aimais profondément. Avec Henri Dutilleux, elle fait beaucoup pour nous. A chaque fois que je les ai appelés, que les ai rencontrés, j’ai toujours bénéficié d’une écoute de leur part. Ce 9ème Concours est dédié à la mémoire de Geneviève Joy ; c’est le moins que l’on pouvait faire. Il se trouve que Hideki Nagano, Prix Samson François en 1994, que Geneviève Joy avait adoré, sera présent dans notre jury cette année.
Propos recueillis par Alain Cochard, le 5 février 2010
(1) Intitulé Prix Chevillion-Bonnaud et inscrit dans la première épreuve du concours, il est décerné à un interprète-compositeur jouant sa propre composition ou à un interprète d’une œuvre récente en création à Orléans
9ème Concours International de Piano d’Orléans
Du 22 février au 2 mars 2010
Salle de l’Institut (Epreuves 1, 2 et 3), Théâtre d’Orléans (Finale)
Tél : 02 38 62 89 22
www.oci-piano.com
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