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Vierge et stupre - La Calisto de Cavalli au TCE
C’est avec Le Couronnement de Poppée l’autre grand chef-d’œuvre du premier Théâtre lyrique vénitien et même si le livret de Giovanni Faustini, inspiré de loin par les Métamorphoses d’Ovide, aussi remarquable d’invention et de licence soit-il, ne peut se comparer à l’admirable bouillonnement scénique produit par celui que Gian Francesco Busenello ficela pour Monteverdi, La Calisto de Cavalli est simplement irrésistible, avec son savant mélange de poésie et de satire, d’émotion et d’humour.
Son héroïne désinvolte et sensuelle est l’un des plus admirables caractères qu’ait enfanté l’opéra baroque, on en retrouve des traces jusque dans la Cléopâtre du Jules César ou la Sémélé de Haendel.
Le style de Cavalli atteint ici à son acmé, effaçant les frontières entre le style récitatif, les ariosos et les duos, créant de facto le théâtre lyrique moderne, où la pensée sexuelle est omniprésente, au point même d’occuper les rapports d’un adolescent obsédé avec une vielle nourrice lubrique. Mais ce n’est pas tout : Jupiter est bien efféminé et Endymion lui plait vraiment, un Satyre pique tout un chacun ; bref la comédie du sexe est partout, mais c’est à Endymion que reviennent les musiques les plus sensuellement pâmées.
Le pauvre Faustini n’aura que peu survécu à ce qui demeure son chef d’œuvre de plume : il meurt à 36 ans le 19 décembre 1631, vingt jours après la création de La Calisto au Théâtre San Cassiano. Un spectacle anthologique, réglé pour la Monnaie de Bruxelles par Herbert Wernicke (son grand œuvre en fait, il n’aura rien réussi d’autre qui soit à ce point concentré et inspiré) contraint tous ceux qui se risquent à mettre en scène La Calisto à se surpasser. On craint que Macha Makeïeff n’en exalte d’abord la vis comica. Prions pour que ce ne soit pas seulement cela.
La distribution est luxueuse, Sophie Karthäuser dans le rôle titre, Lawrence Zazzo en Endymion, Veronique Gens en Junon, Marie-Claude Chappuis pour Diane, figure centrale de l’ouvrage du côté des Dieux. L’orchestre de Christophe Rousset sera-t-il aussi coloré que celui de René Jacobs ? En tous cas, si Rousset conduit sur le texte de Faustini l’admirable travail qu’il déploie sur les poèmes des Tragédies Lyriques, on devrait découvrir La Calisto sous un autre angle.
Jean-Charles Hoffelé
Francesco Cavalli : La Calisto
Théâtre des Champs-Elysées, les 5, 7, 9, 11 et 14 mai 2010
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Photo : DR
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