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« Wagner, Wotan, François et les autres » – Amoureuse impertinence – Compte-rendu

 

D’aucuns ont peut-être en mémoire « Comment Siegfried tua le dragon », présenté en 2018 par la compagnie lyonnaise Le Piano ambulant, dont on vous avait dit ici la pleine réussite.(1) François Salès y était déjà présent au hautbois et au cor anglais, mais aussi ... au mélodica, aux appeaux, à l’enclume ! Et, quand besoin était, il prenait la voix des géants ou de Siegfried dans un spectacle mu par un profond amour pour l’univers wagnérien. Amour pimenté d’une savoureuse impertinence ...

 

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Dans ce même esprit, François Salès est de retour avec un seul en scène lui aussi inspiré du Ring. Et de nous narrer cette œuvre-monde ; en 10 secondes d’abord – si, si ! –, puis en une minute, et finalement, une grosse heure. Un attachement tout particulier à Wotan le guide dans son entreprise ; attachement qui ne l'empêche aucunement d'en voir toutes les faiblesses. Pour raconter chaque volet de la Tétralogie, le caractériser, faire ressortir les traits de caractère des personnages, Salès fait appel à un petit castelet posé sur une table (Claire Truche signe la mise en scène, Anne Dumont le décor), son verbe généreux s’appuie sur des extraits musicaux (tirés de l’enregistrement de Solti), il fait usage d’un strict minimum d’accessoires, verres en particulier, utiles ô combien ! Cela avec une verve et une drôlerie irrésistibles.
 

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Soixante-quinze minutes seulement, et il trouve en plus le temps de vous parler de François, de l’enfant qu’il fut, emmené par son père au paradis de l’Opéra de Marseille, sans oublier la boisson qu’on lui offrait à l’entracte – un célèbre soda, d’ailleurs très présent dans le spectacle. Le temps aussi de vous expliquer le système d’écriture de Wagner, d’évoquer quelques ... « emprunts » (poke John Williams), d’aborder des aspects moins reluisants du génial Richard et de donner la parole à certains commentateurs – et pas forcément sur le mode de l’éloge (façon Tolstoï se fichant goulûment de Siegfried). Il trouve même le temps de faire chanter son cor anglais pour évoquer comment Tristan und Isolde naquit entre les actes II et III de Siegfried ...
Raconter le Ring, mais aussi embrasser le monde wagnérien tout entier, son ivresse de musique et de beauté : en un temps si court, le projet pouvait paraître fou, mais le résultat est là : surprenant, inclassable, drôle, touchant et pleinement convaincant. Il se murmure que François Salès concocte en ce moment un nouveau spectacle à partir d’une partition germanique bien plus rare ... Vivement !
 
« Wagner, Wotan, François et les autres » a fait une trop brève apparition à la Marbrerie de Montreuil. Des reprises se profilent heureusement à Nice (27 mars), à l’Opéra de Lille (11 mai) et à Pont de l’Arche (12 et 13 mai)  Courrez-y ! Et puisse cette liste bientôt s'allonger.

 
Alain Cochard
 

(1) www.concertclassic.com/article/musique-et-jeune-public-6-le-piano-ambulant-et-son-ring-de-poche
 

 
Montreuil, La Marbrerie, 15 mars 2025 ; reprises le 27 mars (Nice, Théâtre du Château de Valrose, Université de Côté d’Azur), 11 mai (Opéra de Lille), 12 & 13 mai (Pont de l’Arche, Collège Langlois) // francoissales.fr/spectacles/wagner-wotan-francois-et-les-autres
 
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