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Xavier Phillips, Ludovic Morlot et l’Orchestre Philharmonique de Radio France – Fusionnelle intensité – Compte-rendu

Xavier Phillips (photo) a offert un superbe enregistrement de Tout un monde lointain avec Ludovic Morlot et le Seattle Symphony (dont le chef français est directeur musical depuis 2011), dans le cadre d’une intégrale de l’œuvre symphonique d’Henri Dutilleux de bout en bout passionnante. L’entente du chef et du violoncelliste n’est donc pas plus à démontrer que les affinités de X. Phillips avec le Concerto pour violoncelle n°1 de Chostakovitch.
Sa proximité avec l’Opus 107 se comprend mieux quand l’on sait qu’il a eu le privilège, à ses débuts, de travailler la partition avec son créateur, Mstislav Rostropovitch. Une rencontre que le musicien décrit comme « un moment fondateur ». Nul doute que l’héritage dont il est porteur, le rôle de passeur qui est le sien, sont pour beaucoup dans la mémorable interprétation entendue l’autre soir à Radio France.

Ludovic Morlot © Brandon Patoc

L’acoustique de l’Auditorium s’avère idéale pour savourer la musique jusque dans ses moindres nuances ; l’ambiguïté souvent grinçante des mouvements vifs, le lyrisme sombre du Moderato – que d’arrière-plans X. Phillips dévoile-t-il dans cet épisode... – ou encore une cadence au cours de laquelle le soliste ne fait qu’un avec son instrument et déploie un jeu dont la justesse d'intonation le dispute à la profondeur et à la variété de la sonorité. Fusionnelle et bouleversante intensité, qui caractérise d’ailleurs la globalité d’une interprétation à laquelle l'attention permanente, le geste précis et expressif du chef, face à un Philharmonique des meilleurs jours, apportent énormément. Une fervente ovation attend les artistes ; le violoncelliste gratifie sont auditoire d’une magique Sérénade (de la Suite n° 1) de Britten.

La musique russe réussit à Morlot, on en avait déjà eu une illustration en ouverture de soirée avec Prokofiev et sa Suite de L’Amour des trois oranges, d’un relief et d’un mordant parfaits. En seconde partie, la Symphonie n° 3 de Beethoven se refuse au pathos et aux rugissements qu’elle a pu connaître sous d’autres baguettes. L. Morlot mise d’abord sur la clarté du propos, la netteté des attaques et le dynamisme des phrasés au terme d’un concert qui restera d’abord gravé dans les mémoires pour un Chostakovitch d'exception.

Alain Cochard

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Paris, Auditorium de Radio France, 24 février 2017

Photo Xavier Phillips © DR / musicaglotz.com

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