Fondé en 2009 par Vincent Brunel (violon), Aude Pivôt (violoncelle) et Flore Merlin (piano), le Trio Nuori manifeste depuis toujours une belle curiosité et, sans aucunement faire l’impasse sur les plus célèbres ouvrages de son répertoire, de Haydn à Ravel en passant par Beethoven, Schubert, Mendelssohn et Brahms, il réserve une place de choix à des auteurs bien moins courus, français en particulier. Aux noms d’Alkan, Bonis, Boulanger, Chausson, Farrenc, Onslow, Tailleferre et Alexis de Castillon – dont les Nuori ont livré en 2014 un bel enregistrement des Trios op. 4 et 17 (Ligia) –, la formation ajoute aujourd’hui celui d’Henriette Renié (1875-1956). Une artiste d’abord et avant tout associée à la harpe dont elle fut une immense virtuose et une pédagogue très demandée (Marcel Grandjany et Lily Laskine comptent parmi ses disciples).

Sonate pour violoncelle et piano (1er mvt, Allegro appassionato )

Elève de Hasselmans au Conservatoire de Paris, Renié fit de solide études de composition et, forte de l’enseignement de Lenepveu et Dubois, lègue diverses réalisations (dont un superbe Concerto pour harpe en ut mineur, enregistré en 2015 par Emmanuel Ceysson, sous la baguette de Samuel Jean, pour Naïve). La harpe se taille la part du lion dans son catalogue, mais il est des exceptions et c’est tout l’intérêt de l’enregistrement de musiciens du Trio Nuori que de les donner à découvrir.

Trio (1er mvt Allegro risoluto)

Née peu après la fondation de la Société Nationale de Musique(1871), Renié avait quinze ans moment de la mort de César Franck et n’a pas échappé à l’influence de l’auteur du Prélude, choral et fugue, si prégnante sur la musique française de l’époque. Editée en 1919 (date de composition inconnue), la Sonate pour violoncelle et piano, unique composition de Renié qui ne fasse pas appel à la harpe, cite d’ailleurs la Sonate pour violon et piano du « Pater seraphicus ». Placée en ouverture de disque, la Sonate trouve en Aude Pivôt et Flore Merlin de ferventes interprètes qui en traduisent le lyrisme et la secrète poésie, à son comble dans un prenant Andante.

Trio (Final)

Pas moins séduisant, le Trio pour harpe (ou piano), violon et violoncelle (dont on trouve plusieurs versions avec harpe, dont celle de Xavier de Maistre, Ingolf Turban et Wenn-Sinn Yang chez Harmonia Mundi) se révèle ici dans sa version alternative avec piano (c’est une première au disque). On ne peut que se laisser séduire par la lumineuse franchise, la souplesse, l’élan et les couleurs foisonnantes d’une interprétation portée par le piano aussi intense que nuancé de Flore Merlin.

Pièce symphonique (ext.)

Sonate, trio... et solo ! Les Nuori a eu la bonne idée d’inclure la Pièce symphonique en trois parties dans leur programme. L’ouvrage (d’une dizaine de minutes) a été conçu pour harpe et moyennant « quelques légères modifications », comme l’explique la pianiste, s’acclimate fort bien au clavier, ce d’autant que Flore Merlin lui apporte souffle et imagination sonore, soulignant la beauté d’une musique dont la gravité et l’ardente noblesse séduisent immanquablement.

Excellente nouvelle pour les amateurs de musique française du tournant du siècle que le disque du Trio Nuori. Il sort officiellement le 23 mars (1)  et fournira prétexte dans les jours et les semaines qui suivront à divers concerts de présentation (à Lyon, Lausanne, Clermont-Ferrand et Paris).

Alain Cochard

(1) 1 CD Ligia  0302325-18

Concerts de présentation du CD Renié du Trio Nuori (en entrée libre)

© T. Tasheff

 
Site du Trio Nuori : www.trionuori.com  // www.youtube.com/watch?v=WC50zTr97tA&t=6s