Journal
Samson et Dalila à l’Opéra de Metz – Sensible et poignant – compte-rendu
Samson et Dalila de Saint-Saëns s’est depuis longtemps imposé sur les scènes mais n’avait pas été représenté à Metz depuis quelques lustres. Paul-Emile Fourny (directeur de l’Opéra Théâtre depuis 2011) a choisi de privilégier une mise en scène mettant l’accent plus sur le rapport entre les personnages que sur le caractère orientalisant ou le conflit politico-religieux entre Hébreux et Philistins. Le décor très stylisé et intemporel du Slovène Marko Japelj – des tours mobiles qui permettent de passer du palais à la chambre de Dalila ou à la prison – crée un univers étouffant où s’exacerbent les passions. La chute des colonnes du temple à la fin de l’ouvrage, par son économie de moyens, évite de tomber dans la démesure. Les lumières de Patrice Willaume, savamment dosées, mettent en valeur les différents tableaux (y compris au début de l’ouvrage, plutôt statique) et les costumes aux couleurs contrastées de Valérian Antoine et Brice Lourenço permettent de bien distinguer les acteurs du drame, tandis que la chorégraphie du Ballet de l’Opéra, bien réglée, ne cherche pas l’originalité à tout prix.
© Christian Legay - Opéra-Théâtre de Metz Métropole
Jean-Pierre Furlan incarne un Samson scéniquement impressionnant et très impliqué, mais force trop sa voix héroïque au détriment des nuances. L’Albanaise Vikena Kamenica offre du personnage de Dalila une interprétation de toute beauté. A la fois femme fatale telle une Salomé insidieuse, elle manifeste aussi un sentiment profond pour le héros. Son chant riche et puissant au timbre de mezzo capiteux convainc et l’on ne peut que louer ses efforts de diction malgré des nasales approximatives. Ce n’est pas le cas d’Alexandre Duhamel, Grand-Prêtre de Dagon, saisissant de vérité et de méchanceté avec une autorité dans l’intonation et une noblesse qui ne se démentent jamais. Patrick Bolleire assume parfaitement – mais hélas trop brièvement – le rôle d’Abimélech, et le Vieillard hébreu de Wojtek Smilek demeure volontairement effacé.
Fin connaisseur d'une musique qu’il a beaucoup servie, Jacques Mercier dirige en évitant toute surcharge avec la préoccupation de ne jamais perdre de vue la progression du drame. A la tête de son Orchestre national de Lorraine qui répond parfaitement à ses intentions, il exploite toute la vigueur rythmique mais aussi la sensualité de cette partition si riche en subtilités instrumentales (Prélude de l’acte II et Bacchanale très réussie de l’acte III). Le Chœur de l’Opéra-Théâtre de Metz Métropole préparé par Nathalie Marmeuse se montre à la hauteur de l’enjeu : largement sollicité, il assume par sa présence et son homogénéité un rôle de premier plan dans le succès de ce spectacle.
Michel Le Naour
Saint-Saëns : Samson et Dalila – Metz, Opéra-Théâtre, 3 juin ; prochaine réprésentations le 5 juin 2018 / opera.metzmetropole.fr/
Photo © Christian Legay
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