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10e Midsummer Festival 2019 du Château d’Hardelot – Fastueuse ouverture – Compte-rendu
Que de chemin parcouru en une décennie ! Le Midsummer Festival du Château d’Hardelot est né en 2010 ; la manifestation avait d’abord été installée dans une « tour vagabonde » montée spécialement pour l’occasion dans le parc du château. Une autre structure, provisoire elle aussi, a suivi – temps héroïques ... –, jusqu’à ce que soit inauguré en 2016 un théâtre « en dur », véritable petit bijou acoustique et architectural conçu par Andrew Todd sur le modèle du Globe Theater de Londres.(1) Seul et unique théâtre élisabéthain de France, il accueille depuis lors le Midsummer Festival qui, en osmose avec l'activité du Château d’Hardelot/Centre culturel de l’Entente cordiale, a fait de l’axe franco-britannique le fil directeur de sa programmation.
Le Théâtre élisabéthain du Château d'Hardelot © Martin Argyroglo
Concoctée par Sébastien Mahieuxe, directeur artistique, l’édition 2019 (qui marque la 10e édition du Festival et le 10e anniversaire de l’ouverture au public du Château d’Hardelot après d’importants travaux menés par le département du Pas-de-Calais) a de quoi allécher le mélomane. L’avantage est revenu l’Angleterre lors d’une journée inaugurale occupée par Purcell et Haendel. Les uns on été heureux de retrouver, les autres – c’était notre cas – de découvrir un Didon et Enée déjà applaudi à l’Opéra de Massy en février 2018, puis repris en divers lieux (dont le théâtre de l’Athénée en décembre dernier). Benoît Bénichou (mise en scène) et Catherine Kollen (dramaturgie et direction artistique) signent cette production de l’Arcal (compagnie dirigée par C. Kollen) qui trouve à Hardelot un lieu on ne peut plus propice à l’épanouissement de sa prégnante atmosphère.
Avec une reine de Carthage vêtue et coiffée comme Elisabeth 1ère, une scénographie dépouillée mais superbe – bravo à Mathieu Lorry-Dupuis ! – qui délimite fréquemment l’espace par des pans de tulle, ce Didon et Enée oscille entre songe et réalité. La reconstitution du prologue (réalisée par Johannes Pramsohler et Frédéric Rivoal avec des musiques tirées de The Double Dealer, Timon of Athens et Fairy Queen) permet d’imaginer que Belinda, six ans après la mort de Didon, raconte à Enée le sort tragique de cette dernière. L’Arcal a bien des réussites à son actif, mais ce Purcell s’inscrit sans discussion parmi les plus abouties, tant pour son envoûtante mise en scène que la qualité des interprètes.
© A. S. Stoudoplatoff
Les rôles se succèdent et ne se ressemblent pas pour Chantal Santon-Jeffery (photo). Quelques jours après avec été un amoureux Alvarès dans Maître Peronilla d’Offenbach au Théâtre des Champs-Elysées, la soprano ré-endosse le rôle de Didon (qu’elle tient depuis l’origine dans la production de l’Arcal), avec un chant épanoui (et un anglais remarquable !). Noble, émouvante, sans aucune surcharge expressive, elle creuse son personnage d'une une palette expressive nuancée, l’acoustique de la salle se faisant complice des plus subtils raffinements. Pas moins convaincant, Yoann Dubruque campe un Enée très expressif, à la fois viril et complexe. De sa voix ambrée, Daphné Touchais offre une admirable Belinda et l’on remarque aussi la Seconde Dame d’Anna Wall. Quand au chœur, un ensemble ad hoc (2), auquel un rôle central est réservé, il se révèle aussi préparé musicalement que parfaitement intégré à un spectacle finement réglé (superbe scène de la grotte).
Vécue par chacun des protagonistes, cette production est aussi portée par des instrumentistes de premier ordre. Du violon le plus souvent, l’excellent Johannes Pramsohler mène avec ferveur et poésie son magnifique Ensemble Diderot (une douzaine de musiciens ici) et le résultat témoigne d'un fini instrumental et d'une intelligence musicale peu ordinaires.
Music for the Royal Fireworks © Concertclassic
Le public quitte le théâtre sur un nuage et se dirige alors vers les sièges installés sur la pelouse devant le château. Météo parfaite, température idéale pour du plein air : Hervé Niquet et le Concert Spirituel sont au rendez-vous dans un programme « Royal Fireworks ». La Water Music de Haendel (entrecoupée par le non moins inoxydable Prélude du Te Deum de Charpentier) tient de prélude à la nuit, avant que ne résonne la Music for the Royal Fireworks, accompagnée d’un généreux feu d’artifice. Niquet n’en est pas à sa première expérience pyrotechnique et mène l’affaire tambour battant – avec un sens du timing irréprochable !
L'Ensemble Correspondances & Sébastien Daucé © MolinaVisuals
Le 10ème Midsummer Festival ne fait que commencer ; il reste encore deux beaux week-ends à savourer. On y relève un programme « Tirame et Tisbé » (composé d’airs de Clérambault) par l’Ensemble A nocte temporis de Reinould Van Mechelen (21/06), un Musical Night’s Dream (Locke, Wilson, Morley, Purcell, etc.) par le King’s Consort (22/06), formation fidèle depuis l’origine au Midsummer Festival, un récital «Anima Sacra » de Jakub Jozef Orlinski, acccompagné par Il Pomo d’Oro (27/06), une parenthèse vivaldienne avec les Musiciens de Saint-Julien de François Lazarevitch (28/09) et, enfin – moment très attendu car il s’agira d’une première – « Psyché » (sur des musiques de Locke et Draghi), nouveau programme de l’Ensemble Correspondances de Sébastien Daucé (29/06).
Alain Cochard
(1) www.concertclassic.com/article/inauguration-du-theatre-elisabethain-dhardelot-unique-en-france
(2) On s’en voudrait de ne pas nommer ses membres : Jaia Niborski, Clémence Carry, Apolline Raï-Westphal, Fanny Valentin, Manuel Rovira, Juliette Vialle, Jesús Rodil Rodríguez, Noé Rollet, Marco van Baaren, Henni Tekki, Andrés Prunell Vulcano, Louis Morel de Boncourt
Condette, Théâtre Elisabéthain du Château d’Hardelot, 14 juin 2019 // 10ème Midsummer Festival, jusqu’au 29 juin : www.chateau-hardelot.fr/Actualites/LE-MIDSUMMER-FESTIVAL
Photo © A.S. Stoudoplatoff
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