Découverte d’une vocation chambriste
L’aventure du Trio Atanassov commence par hasard, en 2007, lorsque trois élèves du CNSMD de Paris, Perceval Gilles (photo à g., violon), Sarah Sultan (photo à dr., violoncelle) et Pierre-Kaloyann Atanassov (photo au centre, piano), se réunissent de manière ponctuelle pour donner un concert au Festival du Vigan. Fort de leur entente et de leur succès dans la manifestation cévenole, ils décident de poursuivre l’aventure. Dès la rentrée 2007, ils intègrent la classe de musique de chambre d’Itamar Golan au CNSMDP. « Il nous poussait dans nos derniers retranchements, nous incitait à donner le maximum », se souvient P.-K. Atanassov. Une place au palmarès du Concours Vibrarte l’année suivante conforte la vocation chambriste des trois jeunes artistes.

L’influence décisive d’Hatto Beyerle
Bientôt ils auditionnent et sont retenus par l’ECMA (European Chamber Music Academy) –  lancée en 2004 par l’altiste Hatto Beyerle, membre fondateur du Quatuor Alban Berg  – pour participer à un programme pédagogique qui offre à des formations constituées la possibilité de suivre des masterclasses, à raison d’une demi-douzaine de sessions (d’une semaine) par an. Les cours se déroulent dans les différentes institutions partenaires – conservatoires, festivals parfois – de l’Académie. « Une expérience musicale et humaine passionnante, confie P.-K. Atanassov ; tous les deux mois nous partions quelque part en Europe ; Hanovre, Manchester, Helsinki, Zurich, Vienne ... »
Parmi les différents professeurs que le Trio Atanassov a connus dans le cadre de l’ECMA, Hatto Beyerle est d’évidence celui qui a exercé la plus profonde influence. Un pédagogue très attentif à la dimension rhétorique de la musique, à l’articulation. Par ses remarques, il déstabilise beaucoup nos trois jeunes instrumentistes lors de leurs premières rencontres, mais rapidement ceux-ci en mesurent toute la pertinence et font leur miel de l’enseignement d’un maître charismatique.
 

Une vraie identité sonore
Le résultat est là : en 2010, le Trio Atanassov remporte le 1er Prix du Concours de Francfort (Julia Fischer et Christian Zacharias sont dans le jury ...). S’y ajoute, comme dans beaucoup de compétitions, une collaboration avec un agent, qui va permettre l’enregistrement du premier disque de l’ensemble en décembre 2012 (pour le label Hänssler Classic). Programme tout tchèque : le Trio de Smetana côtoie, non pas le trop prévisible Trio « Dumky » de Dvorak, mais le vaste 3ème Trio en fa mineur op. 65 du même. Coup d’essai coup de maître ! L’accueil réservé à ce disque s’avère enthousiaste (un diapason d’or en 2014) et conforte l’essor de jeunes interprètes qui savent garder la tête froide et se concentrent sur la construction d’un vaste répertoire et l’affirmation d’une vraie identité sonore où la clarté, la couleur, l’articulation – merci Hatto Beyerle ! – jouent un rôle clef.
De Haydn à Smetana, de Beethoven à Chostakovitch, les Atanassov explorent bien des pages, sans oublier la musique du XXe siècle et la création avec des partitions de Rihm, Furrer, Auerbach, Greif, Tulve, Sheng ou Hersant. De ce dernier, le Trio sur la Sonnerie de Sainte-Geneviève du Mont de Marin Marais, grand classique de la fin du dernier siècle, est très tôt abordé, tout comme, chose moins courante, le Trio (1880) de Debussy et, bien évidemment le Trio de Ravel, « une œuvre inépuisable » selon P.-K. Atanassov.
 

© Andrej Grilc

Les inspirations baroques de Philippe Hersant
Ces trois ouvrages forment le programme de « Chic à la française », deuxième disque du Trio (1). Six ans après le CD Smetana/Dvorak, les Atanassov ont repris le chemin du studio (en présence de Philippe Hersant pour son Trio), cette fois à la Philharmonie de Paris, pour un résultat enthousiasmant. La longue fréquentation des trois ouvrages en concert porte ses fruits, qu’il s’agisse du Trio de Debussy, réalisation de jeunesse dont les interprètes tirent tout le suc, de celui d’Hersant dont les timbres sont distillés avec une science rare et, enfin, d’un Ravel restitué avec une densité sonore peu commune.
On s’impatiente d’entendre l’ouvrage d’Hersant dans le cadre de la Carte blanche que « Baroque en Partage » lui consacre. Le compositeur a fait appel au Trio Atanassov pour une soirée –  à laquelle participent aussi la gambiste Lucile Boulanger et le claveciniste Fabien Armengaud – au cours de laquelle des pages de Du Mont, Marais (la Sonnerie de Sainte-Geneviève du Mont entre autres) et Louis Couperin viendront mettre en lumière l’influence de la musique baroque sur Philippe Hersant (dont L’Ombre d’un doute pour viole solo et le Trio sont programmés).
Quant aux projets un peu plus lointains du Trio Atanassov, après une participation à la Pochette musicale (le 25 janvier au Musée Jean-Jacques Henner), une saison jeune public dont le succès va croissant, on les entendra à plusieurs reprises dans un programme Schubert, Debussy, Ravel en février, avant de les voir s’aventurer dans les Quintettes de Brahms et de Schumann en avril, avec la complicité d’Anne Weber et Léa Hennino.

Plein succès pour la Schubertiade de Sceaux
Enfin, on n’oublie pas que Pierre-Kaloyann Atanassov est le fondateur et le directeur artistique de la Schubertiade de Sceaux. Une saison lancée à la rentrée 2018 et qui remporte un plein succès. Le 18 janvier un « Dix mains pour un piano » réunira Alain Planès et quelques uns de ses anciens élèves (Simon Zaoui, Natacha Kudritskaya, François Pinel et ... P.-K. Atanassov ! ), avant la venue du Quatuor Hermès (29 février), puis celle du Quatuor Taurus, excellente formation belge qui fera équipe avec le clarinettiste Ronald van Spaendonck (25 avril).

Alain Cochard
(Entretien avec Pierre-Kaloyann Atanassov réalisé le 3 janvier 2020)

Baroque en Partage / Carte blanche à Philippe Hersant
Trio Atanassov, Fabien Armengaud, Lucile Boulanger
Œuvres de Du Mont, Marais, L. Couperin, Hersant
15 janvier 2020 – 20h30
Paris - Salle Cortot
www.sallecortot.com/concert/carte_blanche_a_philippe_hersant.htm?idr=28704

Calendrier du Trio Atanassov :
www.trioatanassov.com/

La Schubertiade de Sceaux
www.schubertiadesceaux.fr/

Photo © Andrej Grilc