Un rayon de soleil dans la grisaille de janvier ! Ils étaient seize candidats venus d’horizons lointains réunis à l’Amphithéâtre Bastille pour la finale de la troisième édition du Concours Voix des Outre-mer, une compétition dont on doit la création au contre-ténor Fabrice di Falco et à Julien Leleu, président de l’association Contres Courants. La soirée (dédiée la mémoire Christiane Edda-Pierre, disparue en septembre dernier), que les spectateurs auront pu suivre en direct grâce au portail des Outre-mer et Francetv Culturebox, aura montré des niveaux très différents (on avait parfois affaire à de complets autodidactes venus tardivement au chant – ce qui nous rappelle aussi que les Antilles françaises ne disposent toujours pas de conservatoires ...), mais a surtout permis de faire de séduisantes découvertes. Et d’avoir une confirmation : celle du talent d’Edwin Fardini (photo à dr., 26 ans) dont le timbre magnifique et l’intense musicalité se sont illlustrés dans un spiritual (Deep River).

Prix Voix des Outre-mer 2021, le baryton (qui représentait la Martinique) est déjà connus des mélomanes. Concertclassic s’était fait l’écho d’un mémorable Lundi musical à l’Athénée en mai 2018 avec Tanguy de Williencourt (bit.ly/2NQov5j) et de son remarquable Buonafede dans Il Mondo delle luna de Haydn en mars 2019 au Conservatoire de Paris (bit.ly/3pEIrpI ), établissement dont le chanteur est issu. Les barytons se sont d’ailleurs distingués puisque cette tessiture appartient aussi au jeune Auguste Truel (photo à g.,16 ans) qui concourait sous les couleurs d’Haïti et a obtenu le prix Jeune Talent avec un « Veau d’or » de Faust impressionnant de sens dramatique. L’outil vocal demande certes à être poli, mais le potentiel est là, considérable. On entendra sûrement reparler de ce jeune homme au caractère d’évidence bien trempé ...
 

Axelle Saint-Cyrel ©wwwquentinprod-photos.com

Du côté des dames, on retient le nom d’Axelle Saint-Cyrel, mezzo guadeloupéenne de 26 ans élève au CNSMDP, dont le « Cara sposa » tiré du Rinaldo haendelien lui a valu une « mention d’encouragement » pleinement méritée. Des « mentions d’encouragement » sont également allées à la benjamine du concours Tinalei Mahuta (Polynésie-Française), 14 ans et complètement autodidacte, dont le « Lascia ch’io pianga » a touché, tout comme, avec des moyens autres (la chanteuse est passée par le CMBV), un extrait d’une zarzuela de Caballero mené avec vie et charme par Clémence Hausermann (15 ans, Martinique).

On n’oubliera pas non plus Véronika Nugent (Guyane) et un « Ah ! Que j’aime les militaires » plein de caractère, Carole Dorlipo (Guadeloupe), merveilleuse de chaleur et de présence dans le « My Man’s Gone Now » de Porgy and Bess, la diction stylée du ténor Cédric Nourry (La Réunion) dans le « Vainement ma bien-aimée » du Roi d’Ys, ni Lesly-Aniel Mouila (Guadeloupe), autodidacte de 17 ans, d’une prenante liberté dans « Amarilli mia bella » de Caccini.

Pendant la durée de la délibération du jury, présidé par Richard Martet (directeur d’Opéra magazine) – jury où figurait Alexandre Neef, directeur de l’Opéra de Paris, maison hôte de la finale depuis la création du concours –, David Zobel, pianiste accompagnateur des divers candidats, a laissé la place à Jeff Cohen. Avec Marie Laure Garnier et Aslam Safla entre autres, les minutes d’attente auront rimé avec plaisir musical, avant l’énoncé d’un palmarès à la remise duquel Roselyne Bachelot, ministre de la Culture (et grande amoureuse d'opéra ! ), a pris part.

Alain Cochard

Paris, Amphithéâtre Bastille, 22 janvier 2021. Disponible sur :   
www.france.tv/spectacles-et-culture/opera-et-musique-classique/2228753-voix-des-outre-mer-la-finale-a-l-opera-bastille.html

Photo ©wwwquentinprod-photos.com