Après avoir pendant de longues années tenu les rênes du Festival de Sablé, Alice Orange a passé le relai l’hiver dernier à Laure Baert à la tête d’une manifestation solidement ancrée dans le paysage de la musique baroque depuis sa création en 1978. Nul dépaysement pour la nouvelle conseillère artistique puisque la soprano est depuis 2017 directrice artistique du Festival International de Musique Baroque de Froville (Meurthe-et-Moselle), qui a fêté son quart de siècle d’existence au début de l’été.
 

Laure Baert, nouvelle conseillère artistique du Festival de Sablé © DR 

En accord avec les responsables de L’Entracte, la structure qui porte le Festival de Sablé, Laure Baert signe une première édition qui témoigne de la volonté de rester solidement attaché à l’identité baroque de Sablé – qui attire chaque année un public très fidèle –, tout en sachant s’ouvrir à de nouveaux spectateurs en conjuguant modernité et accessibilité.
 

Le Mariage forcé (m.e.s. Vincent Tavernier) © Hélène Aubert
 
Molière et Lully : un choix symbolique
 
Le férus de musique dite « classique », qui se rendent au concert aussi naturellement que d’autres à la piscine, oublient parfois que l’objet de leur passion peut aisément sembler intimidant pour les novices. C’est en songeant à eux que Laure Baert a souhaité ouvrir l’édition 2022 avec Le Mariage forcé (photo), comédie-ballet de Molière et Lully, mise en scène par Vincent Tavernier et servie par les comédiens des Malins Plaisirs, la compagnie de danse L’Éventail et les musiciens du Concert Spirituel, emmenés par le formidable passeur qu’est Hervé Niquet. Proposer un spectacle réunissant les arts vivants et montrer que l’on peut rire dans un festival classique : le choix de ce Molière-Lully apparaît hautement symbolique.
Un peu plus loin, le déjà très applaudi « Rossignol et L’Empereur de Chine » de l’Ensemble La Rêveuse et de la marionnettiste Cécile Hurbault, idéalement adapté au public familial, le programme « De Vivaldi à Barbara » de Noëmi Waysfeld, Juliette Salmona et Louis Rodde, ou encore les « Tango Seasons » de Mario Stefano Pietrodarchi et Andrés Gabetta, qui mêlent les populaires et inoxydables partitions de Vivaldi et Piazzolla, participent de cette même volonté d’ouverture.
 

 Léo Warynski © Manuel Braun

A vous de jouer !     
 
Elle se manifeste en outre lors de nombreuses rencontres entre le public et les artistes en amont des concerts (les « A la croisée des chemins » ) et aussi par deux « A vous de jouer ! », avec des danseurs de la compagnie L’Eventail et avec Léo Warynski et Louis Castelain, le chef et l’un des membres des Métaboles. Danse d’une part, chant choral de l’autre ; ces deux rendez-vous permettront à ceux que oseront l’aventure de devenir – modestement – danseurs ou chanteurs le temps d’un atelier et de prendre conscience de bien des choses sous la direction bienveillante d’artistes qu’ils découvriront par ailleurs en concert. 
 
 

Jeanine de Bique © Marco Borggreve

L'année des premières
 
Avec « Cori Allegri », un programme de chœurs spatialisés (Allegri, Charpentier, Benevolo, Pranulyte), le chœur Les Métaboles fera sa première apparition à Sablé. Il ne sera pas le seul, loin de là, au cours d’une édition d’autant plus attirante pour les habitués du festival.
Jean Rondeau y donnera son premier récital en soliste avec les Goldberg, tout comme Emmanuelle Bertrand, interprète de Bach elle aussi (les Suites nos 1, 3 et 5). La première venue du jeune Ensemble El Sol (avec la mezzo Dagmar Saskova) sera prétexte à un programme très hispanisant, tandis que l’on retrouvera le remarquable violiste d’origine cubaine Ronald Martín Alonso, membre des deux formations, dans l’Ensemble Vedado pour des Love Songs avec la soprano Luanda Siquiera. Pour son premier passage à Sablé, Le Concert de l’Hostel Dieu a quant lui concocté une soirée « Jubilatio » aussi contrastée que populaire (Bach, Vivaldi, Avison, Pachelbel).
Enfin, nouveaux eux aussi à Sablé, Jeanine de Bique et le Concerto Köln ont choisi le festival sarthois pour y donner la première française du programme de leur disque « Mirrors », conçu autour de grandes figures féminines de l’opéra baroque (Haendel, Graun, Haendel, Broschi, Vinci, Telemann, Graun).
 
En une soirée et trois journées très denses, la fête baroque s’annonce riche et souriante cette année à Sablé – à des tarifs particulièrement abordables (sans oublier plusieurs rendez-vous gratuits sur la Place Dom Guéranger). Coup d’envoi le 24 août avec Molière l’universel !
 
Alain Cochard

Festival de Sablé
Du 24 au 27 août 2022
Sablé-sur-Sarthe – Lieux divers
lentracte-sable.fr/festival-de-sable/
 
 
Photo © Hélène Aubert