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Les Archives du Siècle Romantique (70) – Des femmes instrumentistes et compositrices (L’Opinion des femmes, 1er mai 1849)
On le guettait avec impatience ; il est enfin là ! Comme son intitulé l’indique, le coffret « Compositrices » du PBZ (1) embrasse en l’espace de huit CD un ensemble d’une vingtaine de créatrices, née au XVIIIe siècle pour la plus éloignée de nous : Hélène de Montgeroult (1764-1836), disparue au mitan du dernier siècle pour la plus proche : Charlotte Sohy (1887-1955) – l’une des plus belles redécouvertes de la période récente en matière de répertoire français, nous semble-t-il. Une foison d’ouvrages s’offrent à l’auditeur, de genres divers, du piano solo et à quatre mains à la musique symphonique et la cantate, en passant par la musique de chambre et la mélodie.
L’initiative du Centre de musique romantique française s’inscrit certes – et de façon exemplaire par la pertinence des choix et la qualité des interprètes – dans un mouvement général de mise en lumière d’artistes occultées jusqu’ici par l’histoire de la musique, mais participe évidemment aussi de la mission première du Palazzetto : l’exploration aussi large et approfondie que possible d’un siècle romantique français longtemps réduit dans la vie musicale à un nombre de compositeurs ridiculement faible – quasi nul même s’agissant des compositrices !
Charlotte Sohy (1887-1955) © DR
Succès oubliés, ou effacés ...
Et pourtant, si oubli posthume, ou effacement délibéré, il y a eu, des compositrices sont parvenues – en dépit d’un contexte social défavorable – à la reconnaissance au cours du XIXe siècle. On en veut pour preuve les réussites d’une Sophie Gail dans le domaine lyrique, ou le succès des partitions symphoniques et chorales d’Augusta Holmès ; une figure passionnante de la fin du XIXe siècle dont un récent programme de l’Orchestre national de Metz-Grand Est, conduit par David Reiland, a souligné les qualités avec un programme (donné à Metz et Paris) où elle faisait plus que bonne figure face à un certain ... Richard Wagner.
David Reiland et sa phalange prennent d’ailleurs part au coffret « Compositrices » avec des pièces de Holmès (l’envoûtant intermède La Nuit et l’Amour de l’ode-symphonie Ludus pro patria), Farrenc (la 3e Symphonie, remarquable de prestesse et d’intensité dans le coloris), Chaminade (la suite de ballet de Callirhoé, suggestive à souhait ; le tendre et volubile Concertino pour flûte, avec Claire Boulanger en soliste)
Ismaël Margain et le Quatuor Hanson à Venise en janvier 2022 © Matteo De Fina
Du concert au disque
Si les découvertes complètes, les inédits abondent au fil de huit CD conçus tels des « concerts imaginaires » où toutes les forment se mêlent, le coffret offre aussi aux fidèles du PBZ la possibilité de retrouver des partitions révélées en concert. Ainsi, la très attendue Symphonie « Grande Guerre » de Charlotte Sohy, captée sous la baguette de Débora Waldman à la tête de l’Orchestre national de France lors du 8e Festival Palazzetto Bru Zane Paris en 2021, confirme-t-elle sa place parmi les grandes réalisations symphoniques du début du XXe siècle. On n’est pas moins conquis par la Grande Fantaisie Quintette (1886) de Rita Strohl, qu’Ismaël Margain et le Quatuor Hanson ont enregistrée parallèlement à un concert vénitien en janvier 2022. Une partition assez irrésistible, qui pourrait bien connaître un succès comparable à la Grande Sonate dramatique pour violoncelle et piano « Titus et Bérénice » de la compositrice lorientaise si des interprètes curieux de répertoires nouveaux décident de s'en emparer ...
Leo Hussain © Marco Borggreve
L’Orchestre du Capitole renoue avec son ADN
Et que l’on est heureux d’entendre l’Orchestre national du Capitole renouant avec son ADN d’explorateur de la musique française rare ! En grande forme sous la direction de Leo Hussain, les Toulousains offrent une ardente ouverture d’Andromède d’Holmès, mais aussi les trois sensuelles Femmes de légende de Mel Bonis, le prenant poème symphonique avec voix Ossiane de Marie Jaëll (confiée à la soprano Anaïs Constans) et la cantate La Sirène de Nadia Boulanger (avec Anaïs Constans, Aude Extrémo et François Rougier), pièce de 1908, d’un souffle et d’un relief saisissants !
Moments plus intimistes
A côtés de partitions pour des effectifs imposants, le coffret comprend nombre d’ouvrages bien plus intimistes. On évoquait Nadia Boulanger, celle-ci est aussi représentée par ses Trois Pièces pour violoncelle et piano (1914), point inédites il est vrai, mais servies avec ferveur par Victor Julien-Laferrière et Théo Fouchenneret. La réussite de ce duo n’est pas moindre dans la Sonate pour violoncelle et piano (1905) de Mel Bonis ni celle (écrite entre 1896 et 1920) d’Henriette Renié, harpiste virtuose doublée d’une compositrice de grande qualité.
Du côté chambriste toujours, on goûtera la complicité d’Alexandre Pascal, Héloïse Luzzati et Célia Oneto Bensaid dans l’Andante et Intermezzo de Clémence de Grandval (1828- 1907) ou le 2e Trio (1844) de Louise Farrenc, réalisation instrumentale qui rappelle que la France, en ce domaine, ne fut pas le désert que l’on a décrit parfois avant la naissance de la Société Nationale de Musique en 1871.(2) S’agissant de la musique pour violon, c’est après ce tournant que l’on se situe, avec la souriante Sonatine de Pauline Viardot (1873) ou, bien plus tardifs, Nocturne (1911) et Cortège (1914) de Lili Boulanger, sous l’archet intense et secret d’Anna Agafia, accompagnée par Franck Braley.
Marie Vermeulin © Wiliam Beaucardet
Le piano à travers le siècle romantique
Siècle du piano, le XIXe a favorisé la naissance de quantités de partitions pour clavier. L’intérêt des choix du PBZ est de dérouler un fil qui va de l’émergence d’une sensibilité et d’une technique nouvelles au début du XIXe, la Sonate op. 5 n°2 (1811) d’Hélène de Mongeroult (dont Mihály Berecz souligne la dimension « con espressionne ») l’illustre, jusqu’au début du XXe siècle avec, par exemple, la Sonate op. 6 (1910) de Charlotte Sohy, première rencontre de la jeune compositrice avec cette forme, restituée d’un jeu plein de vie et de sensibilité par Marie Vermeulin.
Cette dernière, on s’en réjouit, est très présente dans un coffret où elle interprète en outre, avec un parfait sens des caractères et une large palette de couleurs, les Huit Etudes Mélodiques (1857) de Virginie Morel, surprenant cahier d’un charme entêtant, et les sept Femmes de légendes de Mel Bonis (parmi lesquelles figurent Salomé et Ophélie, deux pièces de 1909 orchestrées par la compositrice, dont Leo Hussain offre, on l’a noté plus haut, la version orchestrale (3)) Autre pianiste habitué des aventures du PBZ, François Dumont est de la partie avec un beau bouquet de morceaux de Bonis, parmi lesquelles une émouvante Cathédrale blessée. Présente sur six des huit CD du coffret, Mel Bonis est décidément gâtée : Nathalia Milstein participe aussi à l’entreprise « Compositrices » et à la découverte de Bonis, avec L’Album pour les Tout-Petits, série de vingt pièces pour les commençants, tendres et piquantes, qui fait figure de cerise sur le gâteau au terme du dernier disque. Pour conclure le chapitre pianistique, le quatre-mains n’a pas été oublié, grâce à Roberto Prosseda et Alessandra Ammara : ils s’emparent avec chic des savoureuses et exotiques Pièces romantiques de Cécile Chaminade, des Voix du printemps de Marie Jaëll, de la Suite en forme de valses et des Six Pièces à quatre mains de Bonis.
Cyrille Dubois et Tristan Raës © Rocco Grandese
Mélodies rares à foison
Le coffret « Compositrices » promet de combler la curiosité l’amateur de mélodie, genre cher à un siècle romantique dont le PBZ nous révèle de nombreuses pages inconnues, grâce en particulier à la participation du duo formé de Cyrille Dubois et Tristan Raës Un peu moins d’un an après la sortie de leur merveilleuse intégrale des mélodies de Fauré (Aparté), les deux interprètes placent tout leur art ; art du mot, du dire, relation fusionnelle entre la voix et un piano qui trouve toujours la couleur juste, la nuance exacte, au service de partitions signées Hedwige Chrétien, Cécile Chaminade, Marie Jaëll, Rita Strohl – artiste qui n’a pas fini de nous étonner ! – Augusta Holmès, Marthe Bracquemond, Clémence de Grandval, Marie-Foscarine Damaschino, Madeleine Jaeger, Marthe Grumbach, Madeleine Lemariey (mystérieuse compositrice dont on ne sait strictement rien sur le plan biographique – un pseudonyme peut-être ...), Jeanne Danglas (dont le caressant L’Amour s’éveille figure aussi au menu du coffret en version uniquement orchestrale, sous la baguette de François-Xavier Roth avec ses Siècles). Révélées par l’enregistrement de Marie Perbost avec l’Orchestre d’Avignon et Débora Waldman pour La Boîte à Pépites (4), les trois Méditations op. 18 (1922) de Charlotte Sohy les occupent aussi, et ne convainquent pas moins en version ténor et piano.
A côtés des contributions de Dubois et Raës, on ne manquera pas, enfin, de saluer l’apport de Yann Beuron (avec David Zobel), tendre, expressif mais jamais mièvre chez Mel Bonis, ou encore des mélodies de Pauline Viardot, défendues avec beaucoup de caractère par Aude Extrémo (avec Etienne Manchon au clavier).
Un événement discographique de taille pour tous les curieux du versant féminin de l’histoire de la musique, trop longtemps négligé, et pour tous les passionnés de musique française de façon générale, on l’aura compris. Les Archives du Siècles Romantique lui font écho avec un document daté de 1849, au cœur donc de la brève période de la Deuxième République (1848-1851), durant laquelle la réflexion féministe connut des avancées significatives. En témoigne notamment le périodique L’Opinion des femmes qui disparaît malheureusement dès la proclamation du Second Empire. Dans l’un de ses derniers numéros, une artiste qui se présente sous le nom d’Henriette propose une réflexion sur la place des femmes dans la vie musicale de son temps. Elle pose d’une part la question de l’accession à la pratique instrumentale et lie, d’autre part, cette revendication à la pratique d’écriture. La violoniste Teresa Milanollo (1827-1904) et la compositrice Louise Farrenc (1804-1875) lui servent d’exemples.
Alain Cochard
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L’Opinion des femmes, 1er mai 1849
VARIÉTÉS
Quelques faits d’une haute signification se sont produits pour les femmes, dans le domaine de l’art musical.
Si elles savent en apprécier le sens élevé et entier largement dans la voie qu’ils indiquent, des intérêts nouveaux viendront, dans un avenir très prochain, s’ajouter à ceux que la femme a déjà conquis, et agrandiront d’autant sa dignité et son indépendance.
Deux talents féminins, l’un au point de vue de l’art, l’autre au point de vue de la science, méritent d’occuper désormais une place élevée sur la scène musicale : nous voulons parler de Therésa(sic) Milanollo, cette admirable violoniste et de madame Farrenc, compositeur émérite, dont le talent s’est révélé puissant et sérieux.
Therésa Milanollo, apparue pour la première fois parmi nous, il y a quelques années déjà, avait, dans la personne d’une sœur cadette, une élève et une émule tout à la fois. Qui d’entre les heureux n’a pas entendu les accents purs et suaves de ces deux jeunes âmes ? Qui n’en a conservé le plus doux souvenir ?
À leur apparition, le préjugé et les préoccupations secondaires et mesquines, tentèrent bien d’entraver quelque peu dans leur essor le talent naissant des deux sœurs : de tous côtés on protesta, dès l’abord, au point de vue de la grâce et de la bienséance féminine, contre le choix du violon pour les femmes ; on protesta jusqu’à ce que, les voyant à l’œuvre, on se convainquit bientôt qu’un bras de femme, sans y rien perdre de sa beauté et de sa grâce pouvait aussi bien conduire l’archet léger et magnétique que le bras fort de l’homme.
Le succès des deux sœurs dépassa toutes les espérances. L’enthousiasme fut tel que la poésie faillit nous enlever le bénéfice de ces exemples précieux : Les deux jeunes filles n’étaient point des êtres humains, disait-on de toutes parts, mais deux anges ciel descendus parmi les mortels. Voilà pourquoi le charme et la grâce se confondaient en elles et pourquoi le critique n’avait d’autre mission, en les voyant, que de s’abandonner au sentiment de l’idéal qui le dominait.
Térésa Milanollo (1827-1904) photographiée par A-A-E. Disderi © Paris Musée Carnavalet - Histoire de Paris
Il ne fallait pas moins peut-être que cet éclatant triomphe des jeunes innovatrices, pour déraciner un préjugé funeste : le talent complet venait de se produire, la poésie venait de le consacrer, c’était au bon sens à en recueillir les fruits. Dès ce jour, plus d’une jeune fille prit en sympathie le violon, plus d’une mère fut vaincue dans sa répugnance et ne trouva plus aucune raison valable pour que l’archet miraculeux des petits anges ne passât point aux mains de ses filles.
Le coup était porté ; grâce à l’adjonction de la femme, le violon tombait en France dans le domaine public ; l’exercice de cet instrument allait devenir universel. Les charmantes sœurs firent bientôt le tour du monde et, par le fait, prêchèrent en tous pays la réforme instrumentale et l’adjonction des capacités féminines. L’Allemagne, l’Angleterre, le Vieux et le Nouveau Monde, les accueillirent tour à tour et célébrèrent leurs succès. Cette année, pour la seconde fois, la France allait les revoir… mais hélas ! l’une d’elles ne devait plus se faire entendre ; la jeune élève d’une sœur chérie, venait malheureusement de réaliser l’image poétique sous laquelle toutes deux nous étaient apparues ; un ange avait repris son vol vers les cieux !...
Thérésa Milanollo achève seule sa mission. Puisse la pauvre délaissée retrouver parmi de nombreuses élèves, d’autres sœurs par le talent ! Puisse tout une famille de jeunes violonistes se former bientôt par ses soins !
Quand des innovations bienfaisantes ont été consacrées par les sujets exceptionnels, il faut qu’elles s’élèvent à une nouvelle puissance en se multipliant : aussi espérons-nous que d’ici à peu d’années Thérésa Milanollo trouvera parmi ses élèves ses propres accompagnateurs, et que la musique instrumentale, comme la musique vocale, verra se former le quatuor féminin.
L’image de sainte Cécile préludant sur la basse a reçu de nos jours sa consécration dans la personne de mademoiselle Christani, c’est un exemple à imiter.
Louise Farrenc (1804-1875) © Palazzetto Bru Zane - Fonds Leduc
Dans Paris seul, plus de trois mille professeurs femmes trouvent les ressources de la vie dans l’enseignement de la musique. Calculez ce que pourrait ajouter à ce nombre une branche nouvelle aussi importante tante que celle des instruments à corde.
Une femme, m’a-t-on assuré, donne à la maison d’éducation de Saint-Denis, les leçons d’accompagnement. Pourquoi ce fait exceptionnel resterait-il plus longtemps isolé ? Pourquoi les femmes n’accompagneraient-elles pas et n’enseigneraient-elles pas dans les pensions, dans les familles, les nouveaux instruments soumis à leur pouvoir. Pourquoi (et mille raisons semblent l’indiquer) ne seraient-elles pas souvent préférées aux hommes dans ces rapports délicats et intimes ?
En affirmant que le violon, l’alto, le violoncelle réclament désormais le concours de la femme, nous ne faisons qu’indiquer simplement ce qui nous paraît être tout d’abord sur la ligne des progrès faciles à réaliser. Nous ne prétendons nullement aliéner, pour autant, le droit absolu que doit avoir la femme de s’approprier toute espèce d’instrument. Nous croyons, au contraire, que, tout progrès reposant sur l’expérimentation, il faudra bien quelque jour que la femme s’en remette à elle-même pour savoir positivement si tel ou tel instrument est ou non approprié à sa nature.
Un fait nous frappe : nous ne voyons aucun instrument être particulier à la femme ; l’homme a rangé sous ses lois ceux que l’on disait réservés à la grâce, la harpe, la guitare, etc., et cela ne nous choque point ; c’est pourquoi nous avons quelque raison de douter qu’il puisse y en avoir de spéciaux à l’homme seul, à moins que l’on n’aime mieux penser qu’une quantité d’instruments égale à ceux qui sont déjà connus ne soient encore à naître et ne reviennent exclusivement aux femmes.
Dans ce cas n’aurions-nous pas encore mille fois raison de désirer instamment l’expérimentation que nous invoquons de tous nos vœux ? Quel meilleur stimulant pour ingénie inventif, qu’une concurrence émulative et fraternelle ?
On n’est pas sans quelques exemples de l’intervention des femmes aux fonctions de l’orchestre ; mais ces exemples restreints et trop peu connus, ont par cela même peu d’autorité.
À Lichtenthal, près de Bade, il existe un couvent où les différents instruments de l’orchestre sont joués par les religieuses. À notre grand regret, nous n’avons pu vérifier le fait en traversant cette belle vallée, mais nous le ferons quelque jour.
Une circonstance récente nous a fait plus particulièrement regretter que les orchestres fussent exclusivement masculins, et cette circonstance semblait donner à nos regrets toute la valeur d’une accusation.
David Reiland interprète, entre autres, de la 3ème Symphonie en sol mineur (1847) de Farrenc à la tête de l'Orchestre national de Metz Grand Est © DR
Dimanche 20 avril, le dernier concert d’abonnement se donnait au Conservatoire ; le programme était riche, deux symphonies y figuraient, l’une de Beethoven, l’autre de madame Farrenc. Bien que rassurée par les œuvres déjà produites de ce compositeur, ce n’était pas sans une certaine émotion que nous allions voir une femme aux prises avec les plus grandes difficultés de l’art et de la science. Une symphonie, c’est tout une épopée en musique ! Comment le génie féminin se soutiendrait-il devant la largeur d’un tel programme ? Et puis comment se tirerait des difficultés d’orchestration, une femme que son éducation ne met en rapport avec aucun des instruments qui devaient être en quelque sorte l’expression de sa pensée. Ne dirait-on pas d’un historien moderne qui ne connaîtrait point les hommes de son temps ?
Nous en étions au plus fort de nos appréhensions, quand la symphonie commença : Mais, comme les critiques des sœurs Milanollo, à peine la moitié de l’œuvre était-elle achevée, que nous avions oublié notre rôle, nos inquiétudes, le sexe du compositeur, et que notre sentiment vivement sollicité, s’épanouissait libre et heureux à l’audition de ce bel œuvre.
La symphonie de madame Farrenc révèle un compositeur de premier ordre, du moins parmi nos contemporains ; deux morceaux, l’andante et le scherzo, sont particulièrement admirables et peuvent être placés sur la ligne de quelques-uns des plus beaux morceaux de Beethoven et Mozart.
Il nous est précieux d’enregistrer un tel fait ; puisse-t-il être le garant de nos espérances et nous annoncer que dans la question des arts, comme dans toute autre, les femmes vont conquérir le rang que leur présagent leurs aspirations.
Dans un autre article nous reviendrons sur les obstacles qui s’opposent au développement des facultés artistiques de la femme, et nous prions celles de nos lectrices qui auraient des documents et des idées particulières à cet égard de vouloir bien nous les communiquer. Nous insistons d’autant plus sur notre demande, que nous voudrions ne pas borner notre sujet à la musique seulement.
Henriette… (artiste)
(1) « Compositrices » - Coffret de 8 CD PBZ (sortie officielle le 10/03/2023)
(2) Sur les circonstances et les acteurs de la fondation de la Société Nationale de Musique : www.concertclassic.com/article/150eme-anniversaire-de-la-naissance-de-la-societe-nationale-de-musique-1-ars-gallica
(3) La troisième des Femmes de légende pour orchestre, Le Rêve de Cléopâtre, était originellement une pièce pour quatre mains.
(4) https://www.concertclassic.com/article/charlotte-sohy-compositrice-de-la-belle-epoque-jardin-secret
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