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Mozart et Haydn par Le Concert de la Loge et Eléonore Pancrazi au Festival de Pâques de Deauville 2023 – Jeunesse et maturité – Compte-rendu
Réunir dans un même programme Haydn et Mozart n’est pas, sur le papier au moins, un pari esthétique audacieux. Sauf si le choix se porte sur la 1ère Symphonie en mi bémol KV 16, composée par un gamin génial de 8 ans, et sur la cantate Arianna a Naxos (Hob.XXVIb/2) écrite par un compositeur, fin connaisseur de l’opéra italien et lui-même auteur d’un nombre impressionnant d’œuvres lyriques. D’un côté, la jeunesse studieuse et déjà géniale ; de l’autre la maturité d’un autre génie.
C’est donc à une rencontre moins convenue qu’il n’y paraissait au premier abord que nous a convié le violoniste Julien Chauvin et son ensemble Le Concert de la Loge, pour le cinquième concert du 27e Festival de Pâques de Deauville.
La soirée s’ouvre avec la Serenata notturna KV 239 d’un Mozart de 20 ans et d’emblée l’orchestre séduit par ses couleurs, son juste équilibre, son esprit bouffe et ses accents « gipsy ». L’œuvre est légère mais l’interprétation jamais superficielle.
© Claude Doaré
On mesure le chemin parcouru par Mozart en 12 ans à l’écoute de la deuxième pièce du programme, la Symphonie KV 16 composée lors du séjour à Londres en 1764. La partition est sans doute mineure musicalement, mais symboliquement importante. Le Concert de la Loge en donne une interprétation où se mêlent énergie (1er et 3e mouvement) et clair-obscur (2e mouvement).
Un entracte s’impose qui nous évite de comparer, à notre corps défendant, les débuts symphoniques de Mozart et la Symphonie « Le matin » Hob. I:6 écrite par un Haydn de 29 ans. Le lever du soleil est magnifiquement rendu par Le Concert de la Loge qui non seulement excelle vraiment dans ce répertoire, mais prend aussi un plaisir évident à le jouer.
Ultime œuvre du concert, la cantate Arianna a Naxos de Haydn marque sans conteste le sommet de la soirée. Par l’inspiration et l’écriture de cette page concentrée et bouleversante. Par l’interprétation aussi qu’en donne Eléonore Pancrazi (photo). La mezzo-soprano vit autant qu’elle les chante les sentiments qui anime la jeune femme abandonnée par Thésée : incrédulité, douleur, dégoût, colère et même furie. Les émotions qui vont crescendo sont traduites avec une humanité bien réelle par une artiste dont la palette vocale – les graves en particulier – nous impressionne et nous touche.
Thierry Geffrotin
Deauville, Salle Elie de Brignac-Arqana, 30 avril 2023 // 27e Festival de Pâques, jusqu’au 7 mai 2023 : musiqueadeauville.com/paques2023/
Photo © Claude Doaré
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