L’an dernier Alice Renavand, pour ses adieux, incarnait Giselle, une poétique façon de tourner la page pour cette danseuse d’exception, au très fort tempérament, à la présence charismatique, qui tout en ne répondant pas aux normes de la beauté classique, absorbait littéralement le regard. On ne voyait qu’elle ! Mais ce fut le drame : blessée au 2e acte, elle ne put terminer la représentation et le moment du dernier salut fut remis à plus tard. Après une solide convalescence, la voici qui resurgit pour affronter du talon les inlassables répétitions du Boléro de Béjart, sur la mythique table rouge. Elle y sera sûrement mémorable, et fera encore plus regretter son départ.

Sinueuse, elle sait l’être, violente aussi, énigmatique et hypnotisante encore plus. Idéal pour clore ce programme Béjart dont ce sera le dernier coup, dans un rôle, qui même s’il semble expressif plus que technique, n’en a pas moins déchiré les tendons de grands et grandes interprètes, tous épuisés par les crampes, à force de piétiner ainsi, de façon inexorable. « Je suis la stance et tu es la mélodie », disait Béjart en rappelant, pour évoquer l’entrelacement des deux éléments constitutifs du Boléro, cette parole du marié à la mariée dans les textes indiens. Alice Renavand saura, elle, incarner les deux, comme une flamme qui chauffe et brûle à la fois.